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par degrés dans les mœurs. A Java, tout présage la prochaine solution de ce problème, et la population douce, insouciante, bornée dans ses espérances comme dans ses besoins, accepte volontiers une domination qui a sagement posé en principe la participation des chefs indigènes à l’administration civile et à l’exploitation des ressources locales. Il n’en saurait être de même pour les établissemens formés au milieu des tribus malaises des grandes îles voisines de Java. Là, le développement de l’influence européenne, l’extension de la domination néerlandaise, rencontrent et rencontreront encore de grands obstacles. Il sera utile et glorieux à la fois de les surmonter.

Chaque progrès de la Hollande dans l’archipel d’Asie est donc une victoire pour la civilisation, et ne saurait à ce titre trouver la France indifférente ; mais d’autres considérations doivent encore appeler notre attention sur les établissemens hollandais des mers de l’Inde. Si désintéressée que la France paraisse en ce moment dans les questions qui s’agitent aux extrémités de l’Asie, elle devra tôt ou tard reconnaître que l’avenir de son commerce extérieur est étroitement lié à l’affermissement de la domination hollandaise dans ces parages. Java et les importantes possessions dont cette île est le centre pourraient devenir, en effet, pour les produits de l’industrie française, un excellent débouché. Les populations malaises se montrent de plus en plus disposées à accueillir les produits des manufactures européennes, et la France semblerait particulièrement appelée à satisfaire les nouveaux besoins que va créer cette transformation déjà accomplie sur plusieurs points de l’archipel. En prêtant la coopération de notre marine à la Hollande pour la répression de la piraterie dans les mers de l’est, nous trouverions dans cette coopération même un double avantage : nous protégerions efficacement notre commerce, déjà assez important dans ces mers, et nous lui assurerions de la part du gouvernement néerlandais toutes les facilités qui hâteraient son développement légitime.

En terminant cette première étude sur le gouvernement des Indes néerlandaises, nous croyons devoir insister une dernière fois sur ce fait : que le traité de 1824, en centralisant l’action utile de la Hollande sur ses colonies, leur a permis d’atteindre le degré de prospérité actuelle, d’importance politique et commerciale, auquel nous les voyons parvenues. Il faut reconnaître toutefois, comme cause plus immédiate de l’accroissement des ressources agricoles de Java, les sages mesures du gouvernement colonial et l’introduction du nouveau système de cultures. En résumé, grace au traité de 1824 et à ses conséquences, les colonies orientales néerlandaises, loin d’être une charge pour la mère-patrie, offrent, depuis plusieurs années, un excédant de recettes qui, après avoir couvert les intérêts de diverses dettes et les remboursemens de plusieurs emprunts, laisse une balance nette de 8 à 10 millions