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son droit. Nous nous basons, à cet égard, sur l’interprétation loyale des articles 3, 6 et 12 du traité, et nous ne comprenons pas pourquoi « un établissement anglais sur la partie indépendante de Bornéo devrait être considéré comme contraire au traité de 1824. » C’était à la Hollande de veiller, lors de la rédaction du traité, à ce que l’article 6 exigeât pour « tout établissement nouveau sur l’une quelconque des îles de l’archipel oriental » l’autorisation de chacun des gouvernemens respectifs, au lieu de stipuler « qu’aucuns des officiers ou agens des deux gouvernemens ne pourraient former d’établissemens sur ces îles sans l’autorisation préalable de leurs gouvernemens respectifs en Europe. »

Quoi qu’il en soit, et tout en admettant la différence très réelle qui existe entre le but des négociations de 1824 (celui d’éviter dans l’avenir un contact immédiat) et les tendances, alors inaperçues, de l’article 6 du traité, nous sommes convaincu, et nous le répétons, que de ce même traité datent la consolidation du pouvoir néerlandais et sa prépondérance dans l’archipel oriental. Nous n’approuvons pas sans réserve la conduite de l’Angleterre dans cette affaire ; mais, prenant en considération l’ensemble des stipulations du traité, nous avouons que, dans notre persuasion intime, les intérêts néerlandais ont beaucoup plus gagné à cette transaction que les intérêts anglais. Dans le cas actuel, les Hollandais sont maîtres de se soustraire aux conséquences fâcheuses que pourrait entraîner pour l’avenir de leur commerce et de leur influence l’occupation anglaise de Laboean et de Sarawak. Ils n’ont qu’à s’occuper sérieusement, activement et avec leur prévoyance habituelle, de tirer tout le parti possible des avantages naturels que leur donnent une longue possession de certains points importans, leurs relations, également d’ancienne date, avec les princes indigènes, et les habitudes commerciales de l’archipel. Consolider ces relations, protéger ces habitudes, arriver par l’influence de la civilisation, au besoin par la force des armes, à la suppression de la piraterie, qui désole encore les mers de l’Inde, c’est là que doivent tendre tous les efforts du gouvernement colonial. Il serait grandement à désirer que la France et l’Angleterre s’entendissent avec la Hollande et l’Espagne pour mener à bonne fin cette œuvre de civilisation et d’humanité. La question de la piraterie, que nous ne pouvons qu’indiquer ici sans prétendre la traiter à fond, nous ramène à un autre article du traité de 1824, et il est à regretter qu’au lieu d’interpréter dans un sens égoïste les stipulations de ce traité, l’Angleterre et la Hollande se préoccupent si peu d’une de ses dispositions les plus généreuses. Le traité de 1824 stipulait (article 5) le concours efficace de la Grande-Bretagne et de la Hollande pour la répression de la piraterie dans les mers orientales. Nous cherchons en vain, dans l’histoire contemporaine, quelques exemples de cet efficace concours. Des expéditions, des croisières isolées, de vigoureux et persévérans efforts de la part des Hollandais ; de la part des Anglais,