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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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14 décembre 1848.

Le suffrage universel a maintenant donné son dernier mot. Pour n’être point officiellement désigné, l’élu n’en est pas moins acclamé par le public : les résultats journaliers des bulletins électoraux dépassent l’attente des plus confians. M. Louis Bonaparte est enfin président de la république française : Paris l’a nommé à une majorité qui a surpris tout le monde ; l’enthousiasme des départemens ne pouvait plus étonner personne. La vérification solennelle du scrutin se fera dans quelques jours. Nous aurons alors, non pas la révélation du nom vainqueur, nul ne l’ignore, mais bien la mesure exacte de son triomphe ; il sera toujours instructif et bon de la savoir.

En présence d’un événement si considérable et de date si récente, nous devons aujourd’hui nous borner à l’enregistrer. Soit que nous nous reportions en arrière, soit que, par la pensée, nous anticipions sur l’avenir, nous croyons moins à propos de parler que de nous taire. Il ne nous semblerait pas généreux d’insister longuement sur cette semaine malencontreuse, qui a retranché tant de voix au général Cavaignac ; d’autre part, nous n’avons plus rien à dire de la personne du prince Louis, et nous n’avons point encore à nous entretenir de sa présidence. Une seconde phase va commencer pour notre pays dans cette existence aventureuse où il se débat depuis l’orage de février. Nous souhaitons du meilleur de notre ame que cette ère inaugurée par un vœu national aussi éclatant réponde jusqu’au bout aux promesses de force et d’union qu’elle nous apporte à son début ; nous souhaitons qu’elle corrige les erreurs et les maux de celle qui l’a précédée, nous souhaitons qu’elle ait beaucoup de chances de plus pour mener à bien cette difficile guérison de nos intérêts en souffrance et de nos esprits en ruine. Quoi qu’il arrive, elle nous trouvera toujours tels que nous a trouvés l’époque d’où nous sortons, sans complaisances, mais sans passion vis-à-vis des hommes, sans jugemens convenus vis-à-vis des choses.

On le sait bien, nous sommes d’une opinion plus encore que d’un parti, et, si cette position a des inconvéniens, elle a peut-être aussi ses avantages : elle est