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plus qu’aux croisades. Saint Athanase et saint Anselme sont bien morts. Sans doute la tolérance du siècle y est pour beaucoup, mais on peut dire que la froideur des convictions y est aussi pour quelque chose. Ce pauvre doyen d’Hereford aurait assurément mieux fait de ne pas parler si haut, puisqu’il ne devait rien faire ; ce qui doit pourtant, jusqu’à un certain point, l’excuser, c’est qu’il se serait trouvé seul dans son sacrifice. Par sa conduite dans toute cette affaire, l’église d’Angleterre a prouvé qu’elle n’avait pas en elle cette foi ardente et indomptable, cet enthousiasme intrépide, cette flamme intérieure dont la magnifique explosion brisa, il y a quatre ou cinq ans, l’église d’Ecosse en deux morceaux.

La cérémonie ou plutôt la parodie de l’élection s’accomplit donc. Nous disons la parodie, car ce n’est pas autre chose : le chapitre est appelé à donner sa voix ; mais, s’il s’avise de vouloir la donner à tout autre candidat que celui de la couronne, il s’expose à payer du prix de sa liberté et de ses biens cette fantaisie d’indépendance. Les membres du chapitre ne sont que de véritables officiers ministériels, ayant des yeux pour ne point voir et des oreilles pour ne pas entendre ; ce sont des greffiers chargés d’enregistrer des jugemens qu’ils n’ont pas rendus. La part qu’ils prennent à l’élection n’est donc qu’une affaire de pure forme, qui n’engage en rien leur responsabilité morale. On sait que dans les formes du jury, en Angleterre, il faut que la décision soit prise à l’unanimité ; que, s’il y a dissidence, les jurés sont enfermés jusqu’à ce qu’ils se soient mis d’accord, et naturellement la minorité finit par se rallier, pour la forme, à la majorité. La même chose se passa pour l’élection de l’évêque de Hereford ; le doyen commença par voter contre le docteur Hampden ; les autres membres du chapitre, sauf un seul, votèrent pour lui, et à la fin le doyen donna son vote avec le reste, pour rédiger et sceller les certificats demandés par la couronne.

Le docteur Hampden était donc bien et dûment nommé, et l’état restait maître de la place. Les évêques eux-mêmes parurent un instant vouloir poser leurs armes spirituelles ; un de ceux qui avaient signé la remontrance en fit une espèce de rétractation. L’évêque d’Oxford était, de tous les prélats de l’église anglaise, celui dont on devait le moins attendre cette singulière démarche ; non-seulement le docteur Wilberforce était un des treize signataires de la célèbre lettre, mais il avait été, en 1836, un des plus actifs et des plus ardens promoteurs de la censure prononcée par l’université. En sa qualité d’évêque d’Oxford, c’était à lui d’informer, s’il y avait lieu, contre le docteur Hampden, qui exerçait dans son diocèse. Il ne voulut point le faire lui-même, mais il donna l’autorisation de le traduire devant la cour ecclésiastique appelée cour des Arches. Ce fut pendant que cette action se poursuivait que le docteur Wilberforce publia tout à coup une lettre dans laquelle il déclarait qu’ayant relu attentivement les ouvrages du docteur