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Je regrette profondément le sentiment que vous dites régner à ce sujet dans le clergé ; mais je ne puis sacrifier la réputation du docteur Hampden, les droits de la couronne, et ce que je crois être les vrais intérêts de l’église, à un sentiment que je regarde comme fondé sur une méprise et fomenté par les préjugés.

« En même temps, je remercie vos seigneuries d’une intervention que je crois dictée par l’amour du bien public. »

Outre la lettre des treize évêques, lord John Russell en avait reçu une autre signée par quatre cent quatre-vingt-cinq laïques, dont plusieurs membres des deux chambres, et dans laquelle il était dit : « Nous connaissons assez quel profond sentiment existe à cet égard parmi les laïques et le clergé pour être convaincus que cette nomination, si elle s’accomplit, soulèvera des sentimens d’amertume qu’il serait impossible d’effacer et qui amèneraient probablement des conséquences que votre seigneurie déplorerait autant que nous... »

En répondant aux évêques, le premier ministre s’était montré ferme, mais respectueux. En répondant aux laïques, il ne se crut pas tenu à autant de ménagemens. « Je sais, dit-il, qu’il y a chez un certain nombre de laïques et d’ecclésiastiques de fortes préventions contre le docteur Hampden ; mais que sa nomination doive exciter des sentimens d’amertume, c’est, je l’espère, une erreur, car ce serait manquer déplorablement à la charité chrétienne. Je suis tout prêt à encourir les conséquences dont je suis menacé, convaincu que je suis que cette nomination ne tendra qu’à fortifier le caractère protestant de notre église si sérieusement menacé dans l’église romaine. Parmi les chefs de ces désertions, on peut trouver les principaux promoteurs de l’action intentée il y a onze ans contre le docteur Hampden. J’avais espéré que la conduite du docteur Hampden, comme professeur de théologie, avait effacé la mémoire de cet indigne procédé. »

Il faut le reconnaître, tout l’avantage de la logique était du côté de lord John Russell ; il avait la loi pour lui. Aussi son langage est-il très clair, très net et très résolu ; le duc de Wellington, si renommé pour la concision militaire de ses dépêches, n’aurait pas mieux dit. Parmi les évêques, il n’y en eut qu’un seul qui releva le gant ; c’était le plus remuant, le plus militant, le plus vivace de tous : nous avons nommé le docteur Phillpotts, évêque d’Exeter. Toutes les fois qu’il y a en Angleterre une bataille théologique, on est sûr de voir apparaître au plus fort de la mêlée le docteur Phillpotts, mitre en tête et la crosse au poing. Si nous étions au moyen-âge, et que Henri d’Exeter portât la tiare, on le verrait, comme Jules II, entrer par la brèche dans les villes conquises. En l’an de grâce 1847, l’évêque d’Exeter dut se contenter d’écrire une lettre. Il s’attacha, dans sa réplique, à réfuter les principaux argumens de lord John Russell. Ainsi, si les évêques n’avaient