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nombre d’exemples démonstratifs par leur unanimité ; mais ces faits seraient fatigans par leur monotonie : j’aime mieux, en terminant, concentrer l’attention du lecteur sur un monument que renferme le musée de Naples, et qui, à lui seul, suffirait pour établir la thèse que je soutiens aujourd’hui.

Ce monument de granit a la forme d’un biseau tronqué ; à sa face antérieure, il présente neuf figures en bas-relief ; chacune porte une inscription hiéroglyphique. Ces neuf figures, comme l’indiquent les inscriptions, représentent, l’une, le mort en l’honneur duquel ce petit monument funèbre a été élevé, les autres, divers membres de sa famille dont les professions sont énoncées. Le mort est le quatrième en commençant par la droite du spectateur ; auprès de lui sont rangés, d’un côté, son père, ses trois frères et un oncle paternel ; de l’autre, le père et les deux frères de sa femme. Sur la face postérieure sont six figures qui représentent des parentes du défunt, parmi lesquelles sa mère, sa femme, la mère de sa femme et des tantes maternelles. Sur chacune des deux faces latérales, il y a trois parens, en tout, le mort compris, vingt personnes de la famille.

Le mort en l’honneur duquel le monument est élevé était un général d’infanterie. Si le caractère qui suit ce titre ne me trompe point, il commandait l’infanterie étrangère. A côté de ce titre militaire il a aussi un titre civil : il est dit « préposé aux constructions de...[1]. » Son frère aîné a le titre de préposé aux constructions et de prêtre du dieu Emphé. Celui-ci était donc prêtre et architecte, peut-être architecte religieux, tandis que son frère aurait été architecte civil. Son second frère a, comme l’aîné, un titre religieux ; le troisième a le titre singulier de fils royal, et semble avoir été gouverneur de province. Ainsi, voilà deux frères d’un militaire, lequel exerce une profession probablement civile, qui ont des fonctions purement sacerdotales. Le troisième a une fonction administrative et un titre princier. Le père est prêtre d’Ammon.

Quant à la famille de l’épouse du défunt, c’est une famille toute sacerdotale. Cette femme et sa mère sont vouées à Ammon ; son père, son frère, deux frères de sa mère, sont prêtres de divers dieux. Cette famille sacerdotale ne s’est pas moins unie par le mariage avec un général d’infanterie.

On voit que les membres de la même famille appartenaient, les uns à ce qu’on a appelé la caste militaire, les autres à ce qu’on a appelé la caste religieuse, de sorte que, si ces castes eussent existé, deux frères n’eussent pas appartenu à la même caste, ce qui est difficile à comprendre. Nous avons vu aussi que le même individu, remplissant et

  1. Ici est un caractère dont le sens n’est pas encore suffisamment clair pour moi.