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quatre castes principales, ce mot, on le sait, veut dire couleur. Ceci paraît indiquer entre les castes une différence de couleur, et par suite une différence d’origine. On est d’autant plus porté à admettre cette explication, que la population du nord de l’Inde, point de départ évident des races supérieures, montre dans la configuration de ses traits des caractères qui la distinguent des races du sud, lesquelles semblent avoir fourni les élémens des castes inférieures.

Quelque chose de pareil se retrouve-t-il dans l’ancienne Égypte ? Je n’en aperçois nulle trace. Sur les murs des temples et des tombeaux, rois, sujets, prêtres, guerriers, offrent le même type physique. La coloration de leur peau est semblable, nulle différence physiognomonique n’atteste une variété de race. Si une variété de race eût existé, l’art égyptien, qui accuse si nettement dans les captifs le type africain et le type asiatique, n’aurait pas manqué de la reproduire ici.

Quelle que soit l’origine hypothétique des castes, voyons en fait si elles ont existé dans l’antique Égypte. Pour l’examen de cette question, je m’adresserai uniquement aux monumens, et surtout à la classe la plus nombreuse des anciens monumens égyptiens, aux monumens funéraires. C’est aux inscriptions hiéroglyphiques tracées sur les murs des tombeaux, sur les parois des sarcophages, principalement sur les stèles ou pierres funèbres, que je demanderai une réponse aux questions qui m’occupent.

Les monumens égyptiens doivent fournir à ces questions une réponse péremptoire. En effet, tous ces monumens, et particulièrement les stèles funèbres, indiquent toujours le nom du mort et des parens du mort, le degré de consanguinité qui les unissait à lui, souvent la profession qu’exerçait chacun d’eux, quelquefois, enfin, le nom et la profession des parens de l’épouse du défunt. Grâce à ces indications, on peut recomposer le tableau d’une famille égyptienne souvent fort nombreuse, connaître les professions de ses membres, et suivre leurs alliances pendant plusieurs générations. J’ai fait un assez grand nombre de recompositions généalogiques de ce genre sur des familles qui comptaient jusqu’à sept générations. Je puis citer un de ces tableaux funèbres qui contient cent parens. Voyons donc si ces textes, interrogés attentivement, ne fourniront pas une réponse aux questions que nous nous sommes proposées.

Je ne crains pas d’affirmer qu’il n’y a, parmi les savans, personne, ou presque personne, qui mette en doute le sens des signes hiéroglyphiques qui veulent dire père, mère, fils, fille, frère, sœur, etc., qui désignent les principales conditions, les principaux titres sacerdotaux, militaires et civils, etc. Ce vocabulaire bien limité, et que je restreins à dessein pour le rendre plus sûr, ce nombre assez peu considérable d’expressions dont le sens a été en général établi dans la grammaire