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à son retour de Palestine, son royaume ruiné et la noblesse conjurée contre lui ; il dut céder, et renouveler, en les étendant encore, les privilèges qui lui avaient été accordés par le roi saint Étienne. Telle fui l’origine de la célèbre bulle d’or, qui est pour la Hongrie ce que la grande charte du roi Jean est pour les Anglais. Ces deux chartes et les établissemens de saint Louis en France sont à peu près contemporain.

La bulle d’or établit clairement les quatre prérogatives cardinales des nobles hongrois : 1o les nobles ne peuvent être arrêtés qu’après avoir été régulièrement appelés en jugement et condamnés 2o ils ne peuvent être soumis qu’à l’autorité légitime du roi après son couronnement ; 3* ils ne doivent jamais être troublés dans la jouissance de leurs biens ; ils sont affranchis à cet égard de toute dîme, impôt, rente, taxe, sous quelque dénomination que ce soit, sans autre obligation que le service militaire pour la défense et dans l’intérieur du royaume ; 4* enfin, ils ont le droit de résistance légale et légitime à ce qui serait tenté contre leurs privilèges. « Si quelque successeur du roi voulait jamais attenter aux droits consacrés par la présente déclaration, chaque noble peut résister à son autorité légitimement ; sans encourir aucune accusation de hante trahison. » C’est cette clause dont il est si souvent question dans l’histoire de Hongrie ; prétexte, si ce n’est cause, de toutes les rébellions, elle a été définitivement abolie dans la diète de 1687.

La dynastie des Arpad, continuée quatre siècles par une succession assez régulière dans la famille royale, s’éteignit au commencement du XIVe siècle en la personne d’André III, dit le Vénitien, et la nation, ressaisit le pouvoir d’élire elle-même son chef. Dans la période qui s’ouvrit alors, même quand la couronne passa du père au fils, ce fut par le choix, ou tout au moins par la confirmation des états. Cette époque est la partie agitée, brillante et malheureuse de l’histoire de la Hongrie ; le royaume n’en sortit que pour tomber, en 1526, moitié sous le joug des Turcs, moitié sous la domination autrichienne. Parmi les rois de la période élective dont les réformes exercèrent quelque influence sur la législation, on aime à signaler Charles et Louise d’Anjou, dit le Grand, dont la mémoire est chère encore aux Hongrois. Ils apportèrent tous deux des réformes utiles à l’état. C’est sous leur règne que s’établirent les lois sur la procédure civile qui ont subsisté jusqu’à ces derniers temps. L’esprit français, partout où il pénètre, a besoin d’établir l’ordre et la netteté, et s’inquiète presque autant de la forme que du fond.

Les décrets du roi Mathias Corvin, fils de Jean Huniade, le roi le plus populaire de l’histoire de Hongrie, introduisirent, dans le privilège des nobles relatif à l’exemption des impôts, une restriction qu’il faut noter. Le motif de cette restriction fut la guerre que Mathias soutenait