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augmenter la consommation à l’intérieur par la baisse des prix. Qu’on diminue donc en faveur de ces fabriques les droits sur les graines oléagineuses, sur les huiles, sur les graisses, sur les potasses et les soudes ; voilà ce qui leur donnera une activité nouvelle, et c’est ce que nous avons déjà pris soin de proposer. Ces réductions faites, que l’on convertisse hardiment la prohibition actuelle en un droit modéré de 15 ou 20 pour 100 au plus, et l’on peut être sûr que, nonobstant une certaine importation, qui aura lieu sans aucun doute, la fabrique française ne fera que s’étendre et grandir.

Quant à la raffinerie du sucre, elle se trouve dans une position toute spéciale. Cette industrie a eu en France des jours prospères, mais elle y a été sujette aussi à de cruels retours. C’est que son existence et sa prospérité ont toujours dépendu de la fixation légale des rendemens. Comme les droits perçus à l’entrée sur les sucres bruts sont restitués à la sortie sur les sucres raffinés, il a fallu que l’autorité publique déterminât le rendement présumé des sucres bruts en raffinés. Or, cette détermination est nécessairement un peu arbitraire, d’autant mieux que le rendement effectif varie selon la méthode de travail que l’on adopte et selon la qualité des sucres employés. Elle est dans tous les cas fort incertaine, parce qu’elle n’est guère établie que sur des déclarations suspectes. Par le fait, elle a souvent varié. Or, selon que la fixation légale des rendemens a été contraire ou favorable aux producteurs, selon que les fabricans ont obtenu en sucre raffiné plus ou moins que la loi ne supposait, on a vu leur industrie grandir à vue d’œil ou se précipiter rapidement vers sa ruine. Ce sont là des inconvéniens inévitables dans une certaine mesure, et qui sont comme attachés à la position particulière des raffineurs. On pourrait toutefois les atténuer beaucoup en dégrévant les sucres coloniaux et étrangers, parce qu’alors le montant des droits, et par conséquent aussi le montant des primes, entrerait pour une part moins forte dans la valeur totale des produits. Quoi qu’il en soit, cette circonstance est tout-à-fait étrangère à la question de l’admission des raffinés étrangers ; elle n’a même de valeur que parce que nos propres fabricans exportent et ont besoin d’exporter une partie de leurs produits. Que la concurrence étrangère soit donc admise sur le marché français, ce n’est pas là ce qui changera beaucoup leur position ; au contraire, elle la rendra plus sûre et plus stable en permettant d’établir, par une comparaison incessante, une mesure plus régulière pour les restitutions de droits.

L’importation des raffinés étrangers étant admise en principe, resterait à fixer le chiffre des droits. En premier lieu, on percevrait sur ces sucres à la frontière un droit de consommation proportionné à celui qui frappe les sucres bruts, en prenant pour base du calcul l’échelle des rendemens établie à l’intérieur par rapport aux raffinés français.