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tels événemens suffisent bien pour justifier le soulèvement des états germaniques et la rupture des plus solides amitiés ; lorsque Maximilien-Joseph, avant la bataille de Leipsig, renonça à l’alliance de Napoléon, il reprenait sa vraie place. L’Allemagne était en péril ; avons-nous le droit de nous plaindre parce que nous avons trouvé notre allié de la veille dans les rangs de nos adversaires ? Cependant ces guerres de 1813, ces guerres nationales dont le motif était sacré, amenèrent des résultats bien funestes aux peuples allemands. Lorsqu’ils s’armèrent contre le despotisme de l’empereur, ils ne surent pas prendre toutes leurs précautions, et la victoire se tourna contre eux. En vain les peuples et les rois s’étaient-ils juré une étroite alliance dans de solennels engagemens ; en vain des droits politiques avaient-ils été promis à l’Allemagne en échange du sang versé pour l’indépendance des couronnes : le contrat devait être déchiré bientôt par ceux qui en profiteraient. La loyauté était d’un côté, la ruse de l’autre. Qu’arriva-t-il ? Le fait est si connu que c’est presque un lieu commun d’en parler : tandis que la nation se dévouait pour la patrie commune, toutes les royautés de l’Allemagne poursuivaient dans l’ombre un autre but qu’on se gardait bien d’avouer ; ce n’était pas seulement l’empereur, c’était la révolution qu’elles espéraient abattre. De 1813 à 1815, la révolution, en effet, a été vaincue ; c’est de là que datent toutes les défaites de l’esprit libéral et cette longue honte trop patiemment subie jusqu’au réveil de 1830. Eh bien ! voilà les circonstances au milieu desquelles s’est formée l’éducation politique et morale du roi Louis, voilà les influences mauvaises qui ont égaré cette capricieuse et puérile imagination. On l’a vanté comme un de ceux qui, ayant le plus souffert de l’abaissement de l’Allemagne sous Napoléon, s’associèrent le plus ardemment aussi aux généreux efforts de 1813 ; on aurait dû le signaler plutôt parmi ceux qui puisèrent dans cette fatale époque une haine irréconciliable pour les idées modernes. Chez un esprit faux, chez une intelligence frivole et entêtée, cette haine produisit bientôt des parodies bouffonnes. Le fantôme du moyen-âge évoqué avec passion pour combattre le redoutable génie des temps nouveaux, la réaction jésuitique organisée dans la science et dans l’état, l’art détourné de ses libres voies et devenu, sans le savoir, un instrument d’oppression, un dilettante, en un mot, se faisant fort d’arrêter l’esprit humain avec des tableaux romantiques et des cathédrales coquettes, tel est le spectacle donné à l’Allemagne, vingt-huit années durant, par le dernier roi de Bavière, parce bizarre et prétentieux souverain que nous avons vu, le 20 mars 1848, se détrôner lui-même par ses scandales et déposer sa couronne au milieu de la réprobation et de la risée publique.

Tant que le roi Louis fut l’héritier présomptif du trône de Bavière, et même pendant les commencemens de son règne, on ne vit que la