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d’économies qu’il est possible de faire. Il n’en fallait que 260 pour que le budget de la république fût en équilibre ; resterait donc une marge de 100 millions pour subvenir aux dépenses nouvelles que l’avènement de la république rend nécessaires.

Je n’ai examiné jusqu’ici le budget qu’au point de vue de l’école libérale ou républicaine, au point de vue des économies ; il me reste à faire la part de l’école socialiste, car il lui en faut une. Cette part peut être très large, car elle ne comprend rien moins que les budgets actuels de l’intérieur, de l’instruction publique, de l’agriculture et du commerce, et des travaux publics, c’est-à-dire un total de 300 millions ; en y ajoutant les 100 millions d’excédant nouveau des recettes et des dépenses, c’est 400 millions que la république aurait à dépenser par an pour activer le progrès social. N’est-ce pas assez, pour le moment du moins ?

Je n’essaierai pas d’entrer dans l’examen de toutes les idées qui se produisent aujourd’hui. La plupart sans doute sont chimériques, mais elles partent toutes d’un principe sacré, l’amélioration du sort du plus grand nombre. C’est à cette grande et noble tâche qu’il faut travailler. Elle n’est pas d’ailleurs aussi neuve, aussi subversive qu’elle paraît au premier abord. Le gouvernement déchu y travaillait plus qu’on ne veut bien le dire ; sous bien des rapports, il n’y aura qu’à continuer l’œuvre commencée. On changera sans doute les noms pour donner satisfaction à des théories nouvelles, mais on n’aura besoin de rien changer de fondamental aux choses. Que ceux qui craignent une révolution totale se rassurent encore de ce côté.

Je vais prendre un exemple saillant, le plus grand de tous. Un des premiers actes du gouvernement nouveau a été de garantir du travail à tous les citoyens. Cette déclaration a paru aux uns une immense conquête, aux autres une imprudence effrayante. Je ne puis, pour mon compte, partager complètement ni ces espérances ni ces craintes. Ce qui est nouveau ici, c’est la formule ; le fond des choses n’a pas beaucoup changé. Qu’est-ce en effet que ce grand mot de droit au travail ? C’est la reconnaissance d’un fait préexistant, et qui, pour n’avoir pas été encore accepté comme un droit, n’en était pas moins quelque chose d’aussi fort qu’un droit, une nécessité. Le gouvernement déchu s’était montré de tout temps fort préoccupé de cette nécessité de donner du travail aux classes ouvrières. En garantissant le travail, le gouvernement nouveau a été plus loin en principe ; en fait, il n’a pas été, il ne pouvait pas aller plus loin. Il a ouvert des ateliers nationaux, l’autre en a fait autant dans des cas semblables et en aurait fait autant aujourd’hui, car enfin il faut bien, sous tous les gouvernemens, que l’ouvrier vive.

Maintenant quelles seront les conséquences financières de la garantie du travail ? s’ensuivra-