Page:Revue des Deux Mondes - 1848 - tome 22.djvu/473

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

républicaines qui survivent dans cette ville sont des réminiscences d’une illustration purement locale, et ne sauraient la détourner de l’unité. Ainsi divisée comme par le passé, l’Italie deviendrait de nouveau la proie de l’étranger. Elle n’évitera ce danger qu’en s’organisant en une monarchie dont Milan serait la capitale. La position géographique de cette ville, son importance, les grands souvenirs dont elle est remplie (et les journées de mars ne sont pas les moins illustres), tout la désigne pour un pareil choix. Milan seule peut tenir la balance égale entre Gênes et Venise ; c’est le point central où devront converger les quatre lignes de chemins de fer principales, celle de Venise par Vicence et Vérone, celles de Parme et de Modène se continuant sur la Romagne, celles de Gênes et de Turin par Novare, moyen puissant pour établir l’unité entre les populations de ces divers pays. Trois de ces lignes sont déjà en voie de construction ; c’est à les achever avant tout que l’on devra consacrer tous les efforts. Une représentation nationale fondée sur les plus larges bases, car les classes inférieures dans le Milanais et la Lombardie sont arrivées à un remarquable degré de culture, garantira la protection des intérêts locaux, en même temps qu’elle en opérera la conciliation par la discussion en commun. Peut-être sera-t-il opportun que le parlement siège alternativement dans trois ou quatre des villes principales, Venise, Milan, Gênes, Turin. Déjà les congrès scientifiques annuels ont donné en ce sens un exemple utile à suivre et ont opéré un bien notable au point de vue de la fusion des populations. Dans le cas où une résidence fixe paraîtrait préférable, Pavie, comme point central et ancienne capitale du royaume lombard, offrirait, entre autres avantages, celui de la neutralité.

La maison de Savoie est la seule maison royale italienne qui existe aujourd’hui en Italie ; c’est à elle qu’est échue la tâche d’organiser l’unité de l’Italie septentrionale après l’avoir délivrée par l’épée. Cette tâche est difficile et demandera au roi Charles-Albert de plus pénibles travaux que ceux qu’il accomplit en ce moment en face des batteries ennemies. La nouvelle monarchie n’aura de chances de durée que si elle est libérale et constitutionnelle dans l’acception la plus large du mot. A Milan devront être déposés les habitudes et les traditions un peu étroites de la cour de Turin, la politique d’intrigue et les petits expédiens. Le simple soupçon d’une préférence secrète de la part du nouveau roi pour ses anciens sujets serait un danger. Pour que les populations réunies sous sa couronne abdiquent leurs rivalités et se confondent dans une même unité nationale, il faut que l’exemple leur vienne d’en haut et que, cessant d’être Piémontais, le prince se montre et se déclare exclusivement Italien.

La formation d’un royaume de l’Italie septentrionale est la première et la plus urgente question que renferme le problème de l’unité italienne ; elle entraîne après elle l’agrandissement de la Toscane au moyen d’une partie des territoires situés au nord de cet état. Il est indispensable de fortifier la Toscane et de l’ériger en royaume d’Étrurie, si l’on veut qu’elle n’occupe pas un rang trop inférieur dans la ligue italienne. Des circonstances qui semblent assez prochaines pourront amener d’autres combinaisons territoriales dont le résultat serait de réduire à trois le nombre des états confédérés. L’exemple de la Sicile suivi par Naples mettra peut-être un jour l’héritage des Bourbons à la