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et arrière-petite-fille d’Alphonse X[1]. Par ce mariage, don Fernand espérait s’assurer l’appui du roi de Portugal, père de la reine ; le seigneur de Lara, en réunissant les deux rejetons de la lignée d’Alphonse X, prétendait résoudre ainsi définitivement la question de la légitimité des rois de Castille, question qui, longuement débattue, demeurait pourtant encore indécise dans l’esprit des peuples et subsistait toujours comme une cause permanente de révolutions intestines. Quelque légitimes que parussent les droits de don Fernand d’Aragon, qui se fondait sur une décision des cortès et la renonciation des infans de La Cerda, sa qualité de prince étranger rendait sa cause impopulaire ; mais elle était chaudement soutenue par Alburquerque, jaloux du seigneur de Lara, intéressé d’ailleurs à mettre sur le trône un prince faible, qu’il eût dirigé à son gré. Les provinces du nord se montraient favorables aux prétentions de don Juan Nuñez. Burgos et plusieurs grandes villes de la Castille-Vieille, autrefois attachées au parti des infans de La Cerda, attendaient avec impatience le moment de se déclarer pour l’héritier d’une maison qu’elles avaient toujours chérie. Garci Laso de la Vega, adelantade de Castille, un des riches-hommes les plus influens dans cette province, était dans le nord l’agent le plus actif du seigneur de Lara, tandis que don Alonso Coronel, en Andalousie et dans Séville même, se mettait à la tête de ses partisans et lui recrutait ouvertement une armée. Pour le nombre des seigneurs, l’importance des villes, la force des châteaux, l’abondance des ressources en tout genre, le parti des Lara avait incontestablement l’avantage, et il se préparait au combat comme à une victoire assurée.

Le rétablissement inespéré de don Pèdre fit évanouir ces espérances ; mais il n’eût peut-être pas empêché les deux factions ennemies de vider leur querelle par les armes, si la mort subite de don Juan Nuñez et celle de son neveu, le seigneur de Villena, n’eût privé en même temps le parti des Lara de ses deux chefs reconnus. L’un et l’autre succombèrent vraisemblablement à l’épidémie qui ravageait alors la Péninsule[2]. En tout autre moment, la fin prématurée de ces deux

  1. Pour plus de clarté, je joins ici le tableau de la descendance d’Alphonse X :
    Alphonse X, dit le Savant. — Yolande d’Aragon. « Alphonse X, dit le Savant. — Yolande d’Aragon. «
    1. Don Fernand de la Cerda.

    Blanche de France, fille de saint Louis.

    « 2. Don Sanche.

    Dona Maria de Molina.

    «
    Don Alphonse de la Cerda Don Fernand de la Cerda, marié à dona Juana de Lara Don Fernand IV, marié dona Constance de Portugal. Dona Beatrix, mariée à don Alphonse IV de Portugal.
    Don Juan Nunez de Lara. Don Alphonse XI Dona Maria
    Don Pèdre Ier. «
  2. Don Juan Nuñez mourut à Burgos, où il s’était rendu probablement pour soulever la Castille-Vieille, très attachée à sa maison. Amala, p. 29.