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II. – LES SCULPTURES.

Nous avons fait connaître les élémens dont se composait l’architecture du Parthénon. L’entablement du péristyle extérieur avait reçu pour ornemens, outre les boucliers d’or rangés sur l’assise inférieure et séparés par des inscriptions en lettres de bronze, des sculptures en haut-relief ou métopes, glissées à coulisse entre les triglyphes en saillie de l’assise supérieure. Ces métopes étaient sculptées de la main de Phidias, ou du moins ses élèves, eux-mêmes artistes habiles, les avaient faites d’après les dessins du maître. Elles occupaient autour du temple une série de carrés au nombre de quatre-vingt-douze ; chacun de ces carrés renfermait plusieurs personnages : il y en avait quatorze sur chaque façade, et trente-deux sur chaque côté. Ils représentaient ici de nombreux épisodes de la guerre des Centaures, là Minerve luttant contre les géans ou domptant Pégase, qui devait recevoir sur sa croupe le héros Bellérophon ; ailleurs c’était la guerre contre les Amazones, dans laquelle les Athéniens, secondés par Minerve, avaient remporté la victoire.

Ces sculptures faisaient un des principaux ornemens extérieurs de l’édifice la description n’en peut être donnée tout entière avec certitude, car, avant même l’explosion de la poudrière et la chute du milieu du temple, les métopes étaient mutilées ; les Turcs, confondant dans une commune haine les ruines de l’antique religion des Grecs et les monumens du christianisme, avaient ajouté leurs ravages à ceux du temps ; ils avaient abattu les têtes et détaché bien des parties saillantes qui s’étaient brisées en tombant. La portion la mieux épargnée du temps et des barbares était celle du côté du sud, tournée vers Phalère : le Français Carrey la reproduisit dans ses dessins, sans rien changer à ce qu’il voyait et dans la seule intention de constater l’état présent des métopes. La restauration peut se faire pour beaucoup d’entre elles ; pour d’autres, elle est livrée aux conjectures et à l’habileté des sculpteurs. Les métopes présentaient en petit les qualités générales du Parthénon, autant du moins qu’on en peut juger par des restes trop mutilés, et, quoique destinées à faire l’ornement du temple, elles rappelaient, soit par le choix des sujets, soit par la conception large et simple, la noblesse et le charme de l’édifice entier.

On ne peut parler dignement des deux frontons qui, dans l’ensemble de l’édifice, étaient là pour le plaisir des yeux, et qui, pris en eux-mêmes, égalent ou surpassent tout ce que la statuaire a jamais produit de plus parfait. Le temps et les barbares ont détruit ou mutilé les statues de Phidias ; mais, dans ce qu’il en reste, on reconnaît encore à la beauté des formes, à la grace des mouvemens, à la vie qui anime ces chairs couvertes, mais non cachées par les vêtemens, l’art merveilleux du sculpteur[1]. Le milieu du fronton oriental a disparu pour jamais, et il n’en subsiste aucun débris : là était Jupiter assis sur un trône, et Minerve planant au-dessus de sa tête. D’un côté, le titan Hypérion sortait de la mer et ramenait le jour, pendant qu’à l’angle opposé le char de la Nuit se plongeait dans l’Océan occidental. Les chevaux du Jour hennissent d’impatience,

  1. On est réduit, pour retrouver la composition de ces frontons, aux dessins de Nointel et aux fragmens du Musée britannique.