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de sucre faites dans Paris, et dans lesquelles la part principale revient inévitablement à la ville, se sont élevées :


de 1815 à 1819, à 7, 000, 000 kilogr
de 1820 à 1823, à 11, 000, 000
de 1832 à 1835, à 20, 000, 000
de 1836 à 1840, à 22, 000, 000

L’emploi du sucre accompagne celui du lait, et témoigne ainsi d’une nouvelle addition aux substances animales dont s’alimente Paris. Pour l’approvisionnement en grains, il n’en est pas de mieux assuré par la production locale que celui du bassin de la Seine.

Tout vulgaires qu’ils sont, et précisément peut-être parce qu’ils sont vulgaires, ces faits ont une haute portée. La bonne alimentation du peuple, c’est pour lui la santé, la force, la capacité de travail, l’énergie physique et morale : c’est par ce motif que la fécondité de l’agriculture est la base réelle et solide de la puissance et du bonheur de la nation, le point d’appui de tout gouvernement qui voudra, dans l’ordre politique ou dans l’ordre moral, obtenir d’elle de grandes choses.

Les chemins de fer, qui sont destinés à accomplir dans le monde une révolution qui complétera celles qu’ont déjà faites l’invention de la poudre à canon et l’imprimerie, les chemins de fer font entrer aujourd’hui Paris et sa banlieue dans une ère nouvelle : toutes les conditions du mouvement de la population et de l’approvisionnement sont à la veille d’y changer. Quand Paris ne sera plus séparé que par un trajet de quelques heures des villes dont il était, il y a cinquante ans, à plusieurs journées, les circonstances qui détournaient les habitans de ces villes de profiter des avantages attachés au séjour de Paris s’affaibliront beaucoup ; les considérations d’économie qui les retenaient finiront peut-être même par disparaître. Les chemins de fer opèrent déjà, dans toutes les provinces qu’ils traversent, un nivellement dans les prix des denrées nécessaires à la vie ; la valeur de celles-ci augmentera dans les lieux de production, diminuera sur le marché central, et il ne serait pas impossible qu’au bout de quelques années, Paris ne devînt, par la puissance de la concurrence et de l’assortiment, la ville de France où les subsistances, le vêtement, le mobilier, seront le moins coûteux.

De nombreuses industries, qu’on croyait autrefois le patrimoine de certaines provinces, se sont déjà groupées dans l’enceinte ou sous les murs de la ville ; Paris a dès long-temps attiré à lui les intelligences ; les populations commencent à suivre, et, en ce court espace de cinq ans que nous avons plus d’une fois considéré dans cet exposé, ce mouvement s’est clairement manifesté dans le voisinage immédiat de Paris. Les départemens de Seine-et-Oise et de Seine-et-Marne, dont le territoire