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l’institution ne puisse éprouver et utiliser ainsi les lumières ou la fermeté. Le premier recteur a été M. Schinas, qui, comme président de la commission formée en 1833, comme conseiller d’état, comme ministre, comme savant, avait mérité d’ouvrir la voie à ses honorables collègues. La dignité de recteur donnes à celui qui en a été revêtu deux fois le droit de faire partie de la chambre haute ou du sénat. C’est un hommage rendu à la science, qui ne saurait sans injustice être exclue des affaires publiques. La science y arrive encore par une autre voie l’université a son représentant à la chambre des députés, nommé par le corps des professeurs.

Les professeurs qui enseignent à l’université d’Athènes sont aujourd’hui au nombre de trente-deux, répartis entre les diverses facultés. Quelques-uns ont été ministres en Grèce ; la plupart ont étudié en France, en Allemagne, ou dans l’un et l’autre pays. Ils sont divisés en trois classes : 1° les professeurs extraordinaires 2° les professeurs ordinaires 3° les professeurs suppléans ou honoraires, qu’on pourrait encore appeler professeurs à l’essai. Le traitement des premiers s’élève à 3,600 drachmes, celui des seconds à 2,400, et celui des derniers à 1,200. Dans cette classification hiérarchique des professeurs, nous retrouvons encore une imitation des universités allemandes : « A l’université d’Iéna, disait M. Cousin, il y a trois classes de professeurs : 1° les professeurs ordinaires (ordentliche), qui sont nos professeurs titulaires ; 2° les professeurs extraordinaires (ausserordentliche), qui sont nos professeurs adjoints ; 3° les doctores legentes ou privatdocenten, qui ressemblent fort à nos agrégés de médecine. Ces doctores legentes sont la pépinière, la force et la vie de l’université. » En Allemagne, les professeurs de la troisième classe ne sont pas astreints, pour arriver à leurs chaires, à subir la dure épreuve d’un concours. Il suffit qu’ils écrivent une dissertation latine et qu’ils fassent une leçon devant le sénat académique. Une fois admis, ils ont plusieurs années pour donner la mesure de leur talent, dans une chaire, à leur aise, en présence d’un public qui, de son côté, a tout le temps de les juger. L’université d’Athènes a adopté ce système ; elle est résolue à le maintenir dans ses statuts. « Que celui qui demande à enseigner publiquement, disait M. Rhally en quittant le rectorat, soit admis à le faire. S’il ne réalise pas les espérances qu’il a fait concevoir, s’il ne réussit point à attirer les auditeurs, lui seul en subira les conséquences. Aucune promesse ne nous engage envers lui, et lui-même, voyant la stérilité de ses efforts, abandonnera promptement une tâche au-dessus de ses forces. Si, au contraire, le succès répond à ses espérances, nous aurons un candidat éprouvé, prêt à remplacer, s’il le faut, un professeur titulaire. » L’excellence de ce mode de recrutement serait hors de contestation, si l’on en devait juger par la composition du personnel de l’université d’Athènes. Les professeurs y sont à la hauteur de leur tâche. Tous ceux aux leçons desquels nous avons assisté les avaient évidemment préparées avec un soin scrupuleux. A l’heure et au jour fixés, on est sûr de les trouver dans leur chaire. Ils nous ont semblé plus préoccupés du désir d’être utiles que du besoin de briller. Quand leur auditoire trop jeune ou trop peu préparé ne peut s’élever jusqu’à eux, ils abaissent de bonne grace leur cours au niveau d’une classe de collège. Quelques-uns d’entre eux qui ont fait leurs études en France, qui ont assisté aux