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qui semblerait les reporter à une époque antérieure à celle des inscriptions de Khorsabad ; mais une pareille conclusion ne saurait être absolue, par la raison seule que l’éloignement de deux localités aussi distantes que Van et Khorsabad peut et doit même avoir influé d’une façon notable sur l’écriture, et probablement sur le dialecte. Quant à l’écriture des inscriptions trilingues tracées sous les souverains Achéménides, elle offre également des modifications de caractères dont l’appréciation permet presque d’affirmer d’instinct que ces inscriptions sont postérieures à celles de Van et de Khorsabad. Toutefois il est aujourd’hui bien démontré, par les recherches comparatives de M. Botta, que les écritures de ces trois séries de monumens se confondent radicalement en une seule, et que le système babylonien lui-même, système en apparence beaucoup plus compliqué, n’est au fond que le système assyrien.

En résumé, bien qu’on soit parvenu, à l’aide des inscriptions de Van, à reconstruire avec certitude un lambeau généalogique d’une dynastie royale, bien que sur les monumens de Khorsabad on ait pu lire le nom d’un roi Aparanadis ou Aporanadis, qui n’est certainement que l’Aparanadisos du canon de Ptolémée (ce roi a régné de 699 à 693 avant Jésus-Christ), la question du déchiffrement de l’écriture cunéiforme assyrienne ne pourra marcher rapidement vers une solution que du jour où un texte trilingue comme celui de Bisitoun sera mis entre les mains des philologues. Les bas-reliefs déjà rapportés à Londres, et provenant des fouilles exécutées à Nemroud par M. Layard, portent de nouveaux noms royaux. Ceux qui proviennent d’un palais beaucoup plus ancien, d’un palais abandonné et ruiné déjà peut-être au moment où une même catastrophe a détruit les palais relativement modernes de Khorsabad et de Nemroud, offriront d’autres noms royaux à étudier, ainsi que l’a déclaré M. Layard. De l’analyse de ces noms sortiront nécessairement de nouveaux élémens alphabétiques dont la possession simplifiera d’autant les recherches ultérieures. On comprend que nous souhaitions ardemment la publication de ces monumens, puisqu’ils doivent contribuer puissamment à nous donner la clé de documens historiques bien inespérés naguère, et nous aider ainsi à reconstruire au moins quelques lambeaux des annales de l’un des peuples les plus illustres de l’antiquité.


F. DE SAULCY.