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comme elle fait de nos jours, l’agriculture arrivera sans doute à vaincre les difficultés qui entravent encore sa marche. L’industrie a subi de cruelles déceptions. Les chances aléatoires des jeux de la finance ont ruiné bien des fortunes, et, par une réaction toute naturelle, les capitaux se tourneront nécessairement vers l’exploitation du sol, comme les idées s’y tournent depuis dix ans. Les gouvernemens d’ailleurs ont trop souvent l’occasion de reconnaître que la plus terrible des questions qu’ils aient à résoudre est celle des subsistances, et, à une époque où les intérêts positifs dominent la politique, le moyen le plus sûr de conjurer les crises sociales, c’est de prévenir ce cri menaçant : — Le peuple a faim, le pain est cher. — Les épreuves difficiles que nous venons de traverser sont en quelque sorte un stimulant nouveau, et dans cette année même le nombre des publications s’est considérablement augmenté, comme si la disette avait été un aiguillon pour la science.

L’activité que nous venons de constater dans les sciences naturelles et agricoles, nous la retrouvons dans la physique et la chimie, et là encore le nombre des livres augmente sans cesse. On en jugera par le tableau suivant :


1833 48 ouvrages 1838 84
1834 57 1841 108
1835 67 1842 88
1837 70 1843 117

La physique est moins généralement cultivée que la chimie. Représentée dans un grand nombre de villes de province par des hommes d’une véritable distinction, propagée par l’enseignement des facultés où les cours sont suivis avec un grand empressement, alliée puissante de l’industrie et de l’agriculture, la chimie tend à devenir tout-à-fait populaire, et M. Dumas, l’un de ses plus illustres interprètes, a pu dire avec raison qu’elle a le double caractère qui distinguera notre siècle dans l’histoire, d’abord celui de la synthèse qui l’élargit, la poétise même, sans péril pour la sûreté de ses observations, en second lieu celui de la pratique, car elle cherche avant tout à servir les besoins des hommes, les progrès de la société, et elle se regarde avec raison comme un puissant instrument de perfectionnement matériel et moral.

Dans les sciences naturelles, dans la chimie, nous venons de le voir, la production est des plus actives. Il en est de même dans la médecine. Ainsi nous trouvons pour les années


1833 197 ouvrages 1838 187
1834 195 1841 231
1835 213 1842 217
1837 230 1843 236

Ici, comme dans toutes les sciences qui reposent sur des faits, les livres du passé disparaissent pour faire place aux livres modernes. On arrive sans transition d’Hippocrate à Bichat et à Broussais, et il semble que l’érudition, qui formait autrefois la base des études médicales, soit regardée aujourd’hui comme un bagage inutile. Les questions métaphysiques, qui étaient dans l’ancienne médecine comme le point de départ de toutes les théories, ont été de notre temps soulevées pour la dernière fois par Broussais. Ce n’est plus la psychologie, mais