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envers les autres. Les intéressés ont toute chance d’être nommés dans les commissions. S’agit-il de travaux militaires, on choisit des militaires ; de travaux civils, les représentans des départemens où ils doivent s’effectuer. Si la situation des finances trouble quelques membres à l’humeur chagrine, le ministre des finances se rend dans le sein de la commission, et, par des calculs généraux qu’une commission spéciale n’est pas en mesure d’apprécier, calme les appréhensions. Parmi les nombreuses imperfections du règlement de la chambre des députés, la plus grande me paraît être, l’éparpillement des lois de finances entre plusieurs commissions. Les dépenses sont toujours plus ou moins utiles, seulement elles peuvent n’être pas nécessaires. Comme elles flattent un goût, une passion ou une faiblesse dominante, l’appréciation des lois qui les proposent, séparée de celle des ressources, doit nécessairement pousser à la prodigalité ; l’équilibre devient une simple théorie, et le déficit, qu’aucune autorité ne constate, semble être un argument d’opposition. Mieux en état d’apprécier l’ensemble, la commission du budget elle-même sait qu’elle n’agit que sur des apparences, et que tous ses calculs seront illusoires. L’année suivante, des crédits supplémentaires et extraordinaires, des lois spéciales, viendront renverser l’échafaudage de ses chiffres et de ses raisonnemens. Le travail d’une commission financière unique aurait une tout autre efficacité. Sur elle pèserait une responsabilité entière ; elle réglerait en même temps les ressources et toutes les dépenses. Ses réductions porteraient sur des objets plus importans ; elles seraient plus considérables et d’avance sanctionnées.

Si le gouvernement est moralement responsable de presque toutes les augmentations du budget ordinaire, subies plutôt que consenties par les chambres, personne ne peut contester la part qu’ont prise au développement des travaux publics extraordinaires la chambre entière et les députés individuellement : doit-on leur en faire un reproche d’une manière générale et absolue ? Je ne le pense pas, sans accepter néanmoins ce qu’a dit M. le ministre des finances dans la séance de la chambre des pairs du 7 août dernier ; il a appelé le vote de la loi de 1842 une « résolution magnanime. » Cette expression peut paraître étrange dans la bouche d’un ministre des finances à l’égard d’une loi qui, pour une dépense de 600 millions, n’établissait aucune ressource préalable. C’était, en vérité, se montrer magnanime à bon marché pour soi-même et fort chèrement pour ses successeurs. Un ou deux autres actes héroïques de ce genre, et les finances sont à jamais perdues. De nombreuses critiques pourraient sans doute être élevées sur le mode d’exécution et les conditions de tracés des chemins de fer, sur les variations de systèmes et sur ces intermittences de panique et d’engouement dont la chambre nous a donné si souvent le spectacle depuis quelques années. Est-il