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solidité des banques écossaises ne vient pas en grande partie de ce qu’elles ont le crédit anglais pour point d’appui, et cette démonstration, M. Kinnear se garde bien de l’essayer.

L’auteur d’un autre pamphlet intitulé : Free trade and a fettered Currency, met en présence la liberté du commerce et l’assujétissement de la circulation à des règles impérieuses. Ces deux principes ne sont inconciliables qu’en apparence ; mais que le capital soit abondant et que la circulation soit restreinte jusqu’à une gêne très sévère comme cette année, voilà une contradiction réelle, que M. Alison relève et discute à l’aide de faits positifs ; voilà un mal sérieux auquel on peut remédier, nous le croyons, sans compromettre aucune conquête légitime du crédit.

S’il était vrai, comme on le soutient avec plus ou moins de vivacité dans ces divers écrits, que le bill qui a reconstitué la banque d’Angleterre sur de nouvelles bases en 1844 reposât sur des principes entièrement faux, destinés à engendrer des crises monétaires ou à les aggraver, tout ce que la Grande-Bretagne renfermait, il y a trois ans, d’hommes d’état, de financiers et d’économistes éminens seraient tombés, à la suite de sir Robert Peel, dans une énorme méprise en matière de circulation. Jamais, en effet, aucune mesure ne reçut au dedans et au dehors des chambres un assentiment plus manifeste. Les protestations des gros banquiers de Lombart-Street, dictées par des considérations d’intérêt privé, et les rares objections de quelques membres du parlement, se perdirent au milieu de l’approbation générale. Or, l’objet de ce bill accueilli avec tant de confiance, c’était précisément de diminuer la durée, l’intensité, la fréquence des malaises financiers, toujours si funestes aux intérêts industriels et commerciaux. Asseoir le crédit sur une base plus ferme, le soustraire aux fréquentes ondulations du mécanisme monétaire en cherchant à centraliser les moyens d’agir sur ce mécanisme, consolider ainsi tout le système de la circulation, tel était le but de la réforme accomplie. A-t-on fait fausse route ? Faut-il renverser le régime en vigueur pour rétablir la banque sur d’autres fondemens ? Ne serait-il pas possible, au contraire, que, tout en partant de principes vrais, on en eût seulement outré l’application ? Ne serait-il pas possible qu’on eût seulement omis, en se vouant à un isolement éternel, de s’assurer un moyen légal d’approprier l’action de la banque à certaines exigences extraordinaires ? Si cette hypothèse est fondée, comme nous le pensons, rien ne serait plus facile que d’introduire dans le système actuel, sans toucher à ses élémens constitutifs, les modifications que commande déjà l’expérience.

La réforme de 1844 n’était pas une œuvre improvisée dans les bureaux de la trésorerie. Un comité spécial avait été chargé, l’année précédente, par sir Robert Peel, d’examiner la question et de réunir tous les élémens propres à l’éclairer pour le moment où expirerait la charte de dix années accordée à la banque en, 1834. L’usage fréquent de renvoyer l’élaboration des questions administratives ou économiques à des comités produit en Angleterre les plus excellens fruits. Les comités facilitent les solutions, de même que chez nous les commissions créées, par les ministres semblent destinées à les ajourner. Les fécondes recherches du comité de la banque (comittee on banking) avaient fourni à sir Robert Peel une, foule de faits qu’il sut grouper au profit de ses idées. On était frappé, dans son