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Ne sera-ce pas de s’imposer davantage aux corporations ou aux bureaux qu’ils dirigent, de ramasser plus, de serrer mieux dans leurs mains tous les fils de leurs affaires, d’étendre une action plus personnelle à tous les degrés de leurs départemens ? C’est que ces ministres d’une ère nouvelle auront changé de caractère en changeant d’origine ; approuvés par le roi, dont ils resteront les plus dévoués serviteurs, ils auront reçu leur véritable mandat d’une majorité parlementaire, et représenteront directement la volonté du pays, manifestée dans sa plus solennelle expression par son accord avec la volonté du monarque. L’intervention régulière du pays dans la gestion de sa fortune vaudra bien assurément, pour la garantir, ce que valaient auparavant les privilèges des fonctionnaires, et ceux-ci ne perdront d’importance qu’autant qu’alors en gagnera ce fonctionnaire universel qui s’appelle tout le monde. Disons-le bien vite : les mille et mille affiliés de la hiérarchie prussienne, ses bureaucrates de robe, de plume et d’épée, ses référendaires, ses assesseurs, ses conseillers intimes, tous ont encore le temps de se rendormir sur leurs pupitres : le soleil de liberté qui éclipsera le pâle flambeau de leur gloire nocturne n’est probablement pas le soleil de demain.

Je n’ai pas la prétention d’introduire ici le lecteur dans les détails techniques du régime intérieur de la Prusse, dans les appareils des quatre grailles machines qui couvrent toute la monarchie. J’essaie seulement de résumer en quelques mots ce qui me semble aujourd’hui l’état moral de ces vieilles forteresses du gouvernement prussien : je commence par les cultes.

L’un des points les moins remarqués et les plus remarquables de la situation, c’est l’apaisement de l’église catholique en Prusse sous le règne de Frédéric-Guillaume IV. Après les vives émotions qui avaient troublé la fin du précédent règne, ce calme si complet n’est pas un symptôme à négliger. L’agitation catholique dans l’empire actuel dès Hohenzollern ne troublerait pas moins de quatre grandes provinces, Posen, la Silésie, la Westphalie et le Rhin. En même temps qu’il faut se féliciter de la sécurité qui a remplacé d’anciennes inquiétudes, il ne faudrait peut-être pas non plus trop s’abstenir d’en examiner les motifs. Est-ce le respect scrupuleux avec lequel on maintient d’en haut l’égalité des deux cultes privilégiés de la monarchie ? Est-ce la modération intelligente de quelques prélats distingués par leur sens et par leur vertu, comme M. de Diepenbrock, le prince-évêque de Breslau ? Est-ce peut-être la confiance ambitieuse que l’on ne peut s’empêcher de placer dans les inclinations du roi vers les choses du moyen-âge, dans son goût connu pour tous les mysticismes ? Ou bien serait-ce aussi que l’éveil de la vie politique, plus actif encore et plus remuant dans les provinces catholiques (la Westphalie du nord exceptée) qu’il ne l’est partout