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c’est de ne point reculer devant de pareilles dépenses. Nous voulons consacrer tous les ans de fortes sommes à l’entretien de notre armée, de notre marine, à cotre goût pour le luxe et les beaux-arts : raison de plus pour consacrer aussi beaucoup d’argent à ce qui active l’agriculture et l’industrie, car l’agriculture et l’industrie, c’est, en définitive, ce qui donne les moyens de payer le reste Pour donner une idée de la puissance des ressources que renferme notre pays, si l’on veut les mettre en valeur, nous citerons une seule question, celle des biens communaux, On a appelé, dans la discussion du budget du ministère de l’intérieur, l’attention du ministre sur cette question, qui se débat depuis plusieurs années sans résultat. Sait-on quelle énorme valeur représentent en France les biens communaux ? Ils n’occupent pas moins du septième du territoire. Dans certains départemens, ils forment le tiers de la surface totale. Le département de la Creuse, par exemple, compte à lui seul cent mille hectares de biens communaux. Or, ces biens, tout le monde le sait, sont dans un état d’abandon complet. Entre les mains de la propriété privée, ou tout au moins entre les mains de fermiers, ils produiraient bien vite cinq ou six fois plus qu’ils ne produisent aujourd’hui. Nous savons que cette exploitation présente des difficultés, mais nous ne croyons pas ces difficultés insurmontables ; nous savons surtout ce que ces biens communaux, mis en valeur, ajouteraient à la richesse de la France et à la masse de ses subsistances. Après une année comme celle-ci, tout le monde comprendra que le gouvernement s’occupe spécialement de cette matière. En Angleterre, cette ressource est très connue : dans les grands besoins publics, on rend ce qu’on nomme des bills d’inclosure pour appeler sur les terres vagues la propriété et le travail. Aussi bien, le trésor n’est pas moins intéressé que l’agriculture à la mise en valeur de ces biens, car ils sont aujourd’hui frappés de main-morte, et, s’ils entraient en tout ou en partie dans la circulation, ils fourniraient à l’impôt, sous toutes les formes, une source immense de revenus.


REVUE LITTÉRAIRE
I. — Histoire des États européens depuis le Congrès de Vienne. — Grande-Bretagne, par M. le vicomte de Beaumont-Vassy.[1]
II. - Lettres sur l’Angleterre et sur la France, publiées par M. Auguste Nougarède de Fayet.[2]

Un jour que Fox s’entretenait en France avec l’abbé Sieyès sur la nation anglaise, il lui dit : « L’Angleterre n’est pas là où vous la voyez sur la carte ; elle est partout ; l’Angleterre n’est que la capitale de l’Angleterre. » Ces mots disaient beaucoup sans doute, et cependant ils ne disaient peut-être pas trop. Ce qu’il y a de remarquable, c’est que, depuis le jour où Fox les a prononcés, l’Angleterre a grandi encore, et non-seulement elle a grandi, mais elle est forcée de grandir toujours ; car, si elle cessait de s’accroître, elle mourrait. C’est là un merveilleux supplice tel que la fable n’en a pas imaginé de pareil, et il n’est rien de plus curieux dans les temps modernes que d’étudier l’enchaînement de causes

  1. 2 vol. in-8, chez Amyot, rue de la Paix.
  2. 4 vol. in-8, à la même librairie.