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la conversion des rentes, réforme financière déclarée alors si urgente, si indispensable, que le ministère suivant n’a cependant pas proposée, et qui aujourd’hui est encore à faire. Quels propos circulaient à cette époque dans les couloirs de la chambre ? Si nos souvenirs sont exacts, on y entendait dire qu’il était bien désagréable pour la majorité d’avoir à sa tête des hommes qui se refusaient à des mesures indiquées par l’état des finances ; qu’un vote significatif ne ferait pas tomber le ministère, mais lui imposerait l’obligation de se rendre au vœu de la chambre ; qu’après tout, vînt-il à tomber, le sort de la majorité n’en serait pas compromis. Il y avait, insinuait-on, à côté de lui et dans son sein même, des hommes de bonne volonté, moins absolus, qui, après sa chute, accepteraient volontiers la direction des affaires. La majorité croyait-elle que ses destinées fussent inévitablement liées à celles de quelques noms propres ? Ne pouvait-elle donc trouver en elle-même de quoi fournir à de nouvelles combinaisons et renouveler avec avantage le personnel de la scène politique ? L’essai a été tenté. S’en est-on bien trouvé, faut-il le recommencer ? Y a-t-il quelque intérêt public à repasser par les mêmes épreuves ? Voilà, suivant nous, ce que la législature actuelle aura à résoudre. Le parti conservateur veut-il se diviser ? veut-il commencer par essayer de toutes les combinaisons éphémères qui peuvent être prises dans son sein, pour finir, de tentative en tentative, de crise en crise, par livrer de guerre lasse le pouvoir à la gauche ? Entend-il se condamner ainsi à tourner éternellement dans un cercle sans issue ? C’est à quoi il lui convient aujourd’hui de réfléchir sérieusement.


COMTE D’HAUSSONVILLE.