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DE L'HISTOIRE ANCIENNE


DE LA GRECE.




HISTORY OF GREECE, by George Grote. – Tome 1 et 2, Londres, 1846, Murray.




L’histoire moderne est décidément seule en vogue parmi nous ; en France, aujourd’hui, loin d’encourager les recherches sur l’antiquité grecque et romaine, on pense qu’elles appartiennent exclusivement aux érudits, aux pédans, disons le mot, et qu’elles ne s’adressent qu’aux écoliers, encore seulement pour le temps qu’ils sont condamnés au grec et au latin. Je suis de ceux qui trouvent ce préjugé fort injuste. A mon avis, le malheur de l’histoire ancienne, c’est d’être enseignée par contrainte et d’être apprise lentement et péniblement. Nous l’avons épelée dans de sombres classes en regardant à la dérobée un coin de ciel bleu à travers les barreaux de nos fenêtres, en pensant avec regret à la balle ou aux billes que nous venions de quitter. Nous avons lu Hérodote et Thucydide lambeau par lambeau, comme on lit maintenant un roman feuilleton, oubliant le chapitre de la veille et comprenant à moitié celui que nous avions sous les yeux. Hors du collége, si par fortune nous avons retenu quelque chose de ce qu’on nous y a montré, l’histoire ancienne pourra devenir la plus attachante lecture. Tout le monde n’est pas roi ou ministre pour avoir besoin des enseignemens de l’histoire, mais il n’est personne qui ne prenne intérêt au jeu des passions, aux portraits de ces grands caractères qui dominent des peuples entiers, à ces alternatives de gloire et d’abaissement que de près on nomme la fortune,