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tombé. On sait précisément la date de sa chute : elle eut lieu le 4 du ramadan de l’année 656 de l’hégire. Celui qui était encore debout au temps d’Abdallatif portait à son sommet un pyramidion en cuivre. Ce fait montre, dès cette époque reculée, la présence d’un ornement dont M. Hittorf a judicieusement revendiqué l’emploi pour notre obélisque de Paris.

Les anciens nous apprennent que le soleil avait un temple magnifique à Héliopolis. Le soleil désigne ici ce dieu que les Égyptiens représentaient avec une tête d’épervier et dont ils écrivaient le nom Har ou Hor, d’où l’on a fait Horus. Héliopolis était encore célèbre par l’arrivée du phénix, l’oiseau merveilleux qui, au bout d’un certain nombre de siècles, y faisait son apparition. La fable du phénix a été racontée diversement par les anciens. Les Grecs se sont plu à le peindre allumant son propre bûcher, et s’y consumant dans les parfums pour renaître de ses cendres, gracieux symbole de l’immortalité. La piété des Égyptiens pour les morts leur avait fait imaginer que le phénix apportait le cadavre de son père sur l’autel du temple du Soleil à Héliopolis. Hérodote dit que les prêtres lui ont montré l’image du phénix, et qu’il ressemble à un aigle. Cet aigle était peut-être l’épervier, qui est l’hiéroglyphe du soleil, car le phénix était bien évidemment lui-même un symbole solaire. Il venait en Égypte de l’Arabie ou de l’Inde, c’est-à-dire de l’Orient, et, ce qui est décisif, un passage de Tacite[1] nous apprend que l’intervalle qui séparait deux apparitions du phénix était de 1,461 ans. Or, ce nombre est précisément celui des années dont se compose la grande période astronomique au bout de laquelle l’année vague des Égyptiens se confondait avec l’année vraie. Ce moment marquait une nouvelle ère astronomique, une nouvelle phase dans la vie éternelle du soleil. Alors les saisons, après avoir parcouru tout le cercle de l’année vague, s’y retrouvaient à leur place naturelle. C’était une époque solennelle, une époque de renouvellement et de félicité ; elle fut célébrée à l’avènement d’Antonin : des médailles furent frappées pour en garder le souvenir.

Héliopolis est la cité d’On, dont parle la Genèse. On veut dire en copte ce qui brille : c’était le nom égyptien dont le mot Héliopolis, la ville du soleil, était la traduction grecque. Le nom arabe qu’elle a porté depuis, la Fontaine du Soleil, rappelle encore la même origine. Joseph épousa la fille d’un prêtre d’On, c’est-à-dire d’Héliopolis, qui s’appelait Petiphrah (Putiphar), comme le premier maître de Joseph. Petiphrah est un nom bien égyptien, il veut dire qui appartient au soleil. C’est une forme analogue à celle de plusieurs autres noms, comme Pet-Osiris, qui appartient à Osiris. Beaucoup de noms propres,

  1. Annales, VI, 28.