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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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14 avril 1847.


Nous assistons à une transformation lente, mais profonde, des opinions et des partis politiques. Peu à peu d’anciens préjugés s’effacent pour céder la place, dans tous les camps, à une manière nouvelle et plus saine d’envisager les choses. D’agressive et guerroyante qu’elle était, la pensée politique se fait pratique et organisatrice. Il n’est pas un parti qui ne comprenne qu’il se perdrait sans retour dans l’opinion, s’il gardait le langage et les allures des vieilles luttes sur lesquelles le pays a porté un jugement définitif. Le pays veut que le gouvernement s’affermisse de plus en plus, et il ne permettrait plus à personne de l’attaquer dans les principes de son existence, mais aussi il en attend, il en exige beaucoup. Il a les yeux tournés vers le pouvoir, et lui demande de porter partout un esprit sincère d’amélioration, de réforme, enfin de gouverner avec activité et succès.

Une aussi franche adhésion donne au gouvernement beaucoup de force, et en même temps ces vœux et cette attente lui imposent des obligations considérables. Sur ce point, le pouvoir n’en est plus aux conjectures. Des symptômes, des faits irrécusables lui ont appris les sentimens du pays. Les élections se sont accomplies sous la double pensée de la conservation et du progrès, et à la chambre la nécessité de sages réformes a été invoquée et soutenue au sein même de la majorité. Nous comprenons que le gouvernement ne se jette pas avec précipitation dans des changemens arbitraires, d’une utilité douteuse : il n’a pas à jouer le rôle d’un coureur d’aventures ; mais là où la nécessité parle, où elle indique ce qu’il est possible et politique de tenter, la sagesse consiste à agir. Personne n’est en situation aujourd’hui d’enlever au gouvernement l’initiative des améliorations. L’opposition constitutionnelle, l’opposition éclairée peut donner de sages conseils, des excitations utiles ; elle reconnaît elle-même que sa force numérique ne