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Et le roi voit, d’en haut, le flot des tributaires
De son trône effleurer les marches solitaires,
Et cette foule, au loin, s’écarter lentement
De l’amas des trésors qui monte incessamment ;
Planant sur les humains, son regard les méprise.
Telle, sur la montagne, et dans sa force assise,
La tour de Siloë penche sur les coteaux
Son front proéminent et ridé de créneaux,
A l’heure où l’occident, l’inondant de lumière,
Revêt de pourpre et d’or ses épaules de pierre,
Et, sur ses larges pieds, que l’ombre déjà mord,
Du manteau flamboyant soulève un peu le bord ;
Tandis qu’en longs troupeaux défilent devant elle
Les brebis et les boucs que l’abreuvoir appelle,
Poudreux, baissant la tête et l’œil demi-fermé,
Si las du poids de l’air sous ce ciel enflammé,
Que, malgré l’eau plus proche et leur soif plus brûlante,
Le pasteur doit encor presser leur marche lente.

Dans la paix et l’orgueil qui ne craint que l’ennui,
Dénombrant tout un peuple à genoux devant lui,
Tel Hérode régnait, lorsqu’entre et se prosterne
Un messager hâtif, et que la peur gouverne ;
Il tremble, et dit : « Seigneur, des vieillards étrangers,
Des serviteurs nombreux à leur suite rangés,
Partis, comme l’apprend leur langue et leur costume,
Du lointain Orient où le soleil s’allume,
Viennent en demandant, par la ville en émoi
Où donc est-il, ô juifs ! l’enfant né votre roi ? »

Il dit. Mais ont paru trois fronts sacrés par l’âge
Et par la majesté du monarque et du sage.
Ces pasteurs des humains au savoir éprouvé
Parlent : « A l’orient un astre s’est levé
Que nos yeux, dans l’éther accoutumés à lire,
Sur son antique azur jamais n’avaient vu luire ;
Les étoiles du ciel s’éclipsaient alentour,
Car l’astre nouveau-né changeait la nuit en jour.
Il marchait, et, du haut de la splendide voûte,
Sur terre ses rayons décrivaient une route ;
Il faisait chaque soir sa halte dans le ciel,
Et nous l’avons suivi du côté d’Israël.
Les ancêtres, pour qui l’avenir fut sans voile,