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on raisonne d’une manière générale sur notre industrie métallurgique. On voit pourtant que les usines qui le composent sont placées, quant à présent, dans des conditions tout-à-fait exceptionnelles. Il n’est pas étonnant, il est vrai, que les regards du public se soient tournés plus souvent de ce côté que de tout autre, car ce groupe a conservé pendant long-temps, en France, une importance hors ligne. Il y a tenu jusqu’à ces dernières années, à tous égards, le premier rang. S’il l’a cédé, depuis peu, quant à la production de la fonte et du fer, au groupe des houillères du sud, il le tient encore pour le nombre des usines, et il le tiendra toujours pour l’abondance du minerai. Il est même permis de croire que, lorsque les voies de communication actuellement projetées ou en cours d’exécution seront terminées, ce groupe recouvrera sans trop de peine, et sur tous les points, la primauté qu’il a perdue. Nous croyons toutefois que jamais le travail ne s’exécutera dans la Haute-Marne de la même manière que dans les pays houillers. Il est probable que l’on continuera à s’y servir du charbon de bois pour la production de la fonte, en réservant la houille pour opérer la conversion de cette fonte en fer. Par là on conservera aux fers du pays les qualités qui les distinguent, et en même temps l’économie très notable qu’on obtiendra dans l’emploi du combustible végétal permettra d’en modérer le prix.

Les voies de communication qui, dans un avenir prochain, desserviront ce groupe sont : 1° le canal de la Marne au Rhin, lequel, prolongé par le canal dit des houillères, y apportera les houilles de Sarrebruck ; 2° le chemin de fer de Paris à Strasbourg, qui rendra à peu près les mêmes services ; 3° le canal de l’Aisne à la Marne, par où seront transportées jusqu’à Vitry les houilles de Mons et de Charleroi, qui n’ont pas encore paru dans ces contrées ; 4° le chemin de fer de Saint-Dizier à Gray, qui apportera au cœur même du groupe, qu’il traversera dans toute son étendue, les houilles de Saint-Étienne. Quand ces travaux seront terminés, et quelques-uns touchent à leur terme, la houille de Sarrebruck ne reviendra, selon M. Ch. Collignon[1], rendue à Vitry, qu’à 2 fr. 30 cent. les 100 kilogrammes, et la houille belge à 2 fr. 50 cent., sur le même lieu. Quant à la houille de Saint-Étienne, elle y sera toujours un peu plus chère, et ce n’est guère que dans la partie méridionale du groupe, ou dans le centre, qu’elle pourra soutenir la concurrence des autres.

Si quelque chose doit étonner, c’est que des travaux de communication si importans, si nécessaires, qui pouvaient épargner à la France de si énormes sacrifices, ne soient pas achevés depuis long-temps ; qu’on ait tant de fois gémi sur l’infériorité plus ou moins réelle de notre industrie

  1. Du Concours des Canaux et des Chemins de fer.