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valeur, ils restent peu dans la circulation, et ils rencontrent presque aussitôt le point où ils doivent être convertis en espèces. Si la valeur en est très faible, au contraire, il n’y a pas de raison, dans l’état ordinaire des choses, pour qu’ils se présentent au remboursement. Cependant, chez les peuples dont l’imagination s’emporte facilement, les petites coupures ont un grand danger. Les billets de banque alors tombent entre les mains des dernières classes de la société, et le plus léger prétexte peut suffire pour alarmer cette partie peu éclairée du public et la déterminer à se porter en masse sur la banque, afin d’obtenir le troc des billets contre des espèces métalliques. Nous avons vu, il y a peu d’années, à l’occasion d’un changement inoffensif dans la comptabilité des caisses d’épargne, combien chez nous le populaire était crédule et facile à égarer au sujet des titres qui représentent son avoir. Si une banque s’avisait de ne pas vouloir émettre de billets de moins de 10,000 fr., personne à peu près ne voudrait de ses billets ou ne les accepterait que pour aller aussitôt les changer, et les transactions de la banque seraient réduites au même point que si le privilège d’émettre des billets ne lui avait pas été concédé. D’un autre côté, si une banque émettait, autant que le service des échanges commerciaux le permettrait à un moment donné, des billets de 5 francs, en supposant que la population les acceptât, tout le numéraire métallique quitterait le pays, parce qu’il peut s’exporter, pendant que les billets sont forcés de rester, n’ayant pas cours au dehors. Puis, si quelque panique, provoquée par des inquiétudes plus ou moins fondées sur la solvabilité de la banque, poussait les citoyens à vouloir des écus au lieu des billets, ou si tout à coup le pays était mis dans la nécessité d’exporter extraordinairement des écus pour solder une acquisition imprévue comme celle des grains que la mauvaise récolte nous a contraints cette année d’aller chercher au dehors, les banques ne pourraient subvenir à la demande d’espèces et seraient forcées de suspendre leurs paiemens. Il y a donc un milieu entre la valeur de 10,000 francs qui exclut les billets de la circulation et celle de 5 francs qui leur ferait y prendre une trop grande place. La Banque s’est arrêtée chez nous au terme moyen de 500 francs. Est-ce trop, ou n’est-ce pas assez ?

Il y a un moyen aisé de répondre à cette question : c’est de comparer la masse des billets qui circule avec celle des écus qui reste dans les caves de la Banque. Si la Banque n’émettait que des billets de 10,000 francs, elle n’en placerait probablement pas pour 2 ou 3 millions dans Paris, et par conséquent les 200 millions de numéraire qu’elle recèle habituellement dans ses caves, comparés aux billets qu’ils serviraient à garantir, présenteraient une réserve métallique exagérée jusqu’à l’absurde.

Avec les billets actuels de 500 francs, il circule dans Paris 260 millions environ en billets, contre lesquels la Banque, en temps ordinaire,