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de l’Algérie est, nous l’avons souvent dit, la seule qui puisse aboutir à une conclusion.

Le second travail de M. de Lamoricière n’a reçu jusqu’ici qu’une publicité incomplète. Résumé dans le journal l’Algérie, il a été imprimé provisoirement en très petit nombre, pour être distribué à quelques hommes d’état et à quelques personnes qui réunissent à un zèle passionné une connaissance spéciale des besoins de l’Afrique française. Le mémoire est accompagné de l’inévitable correctif, la réfutation assez vive de M. le maréchal Bugeaud[1], dont on admirera la dextérité à reproduire sous toutes les formes son plaidoyer pour la colonisation militaire. Nous ne croyons pas être indiscret en exposant à une vive lumière les idées que l’honorable général a cru modestement devoir laisser dans un demi-jour. De semblables études, même lorsqu’elles donnent prise à la critique, sont profitables au pays et augmentent l’éclat des services militaires.

Après avoir limité le champ de la colonisation dans la province de l’ouest, en traçant un grand triangle qui a sa base sur le bord de la mer d’Oran à Mostaganem, et son sommet à Mascara, M. de Lamoricière a posé en ces termes le problème dont il cherche la solution pratique : « Déterminer le chiffre de la population européenne agricole, qui suffirait seule à nourrir les 25,000 habitans, 2,000 chevaux ou, mulets qui peuplent les villes de la province d’Oran, et en outre 25,000 hommes de troupes et 6,000 chevaux ou mulets, effectif nécessaire à la défense du pays dans les circonstances ordinaires. » Une exploration du territoire, en ce qui concerne du moins la mise en culture des terres et l’établissement des colons européens, a été confiée à une commission choisie dans l’état-major de la division. M. le lieutenant-colonel de Martimprey a débattu avec les indigènes les nombreuses questions qui se rattachent à la propriété des lieux. Au point de vue spécial de l’agriculture, la nature du sol et des eaux a été étudiée par M. d’Illiers, chef d’escadron. M. le capitaine d’artillerie Azema de Mont gravier a donné une utilité pratique à des recherches d’archéologie. Le relevé topographique a été fait par M. le capitaine Gelez, avec les secours de M. Brahemscha, interprète principal, et de plusieurs indigènes, anciens fonctionnaires du gouvernement turc. Ces travaux préliminaires, auxquels six semaines ont été consacrées, ont répondu au désir de M. de Lamoricière et obtenu la sincère approbation du maréchal. Du mémoire très remarquable de M. d’Illiers, il résulte que le triangle ouvert à la colonisation offre une superficie d’environ 102,000 hectares, qu’il admettrait au moins 83 centres de population

  1. Le maréchal vient de faire imprimer à Alger le plan de M. de Lamoricière, précédé de ses Observations critiques : cette brochure n’a pas encore été répandue à Paris.