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les royaumes de Wurtemberg, de Bavière, sont debout. Si la confédération du Rhin a disparu dans le vaste naufrage de Napoléon, l’Allemagne méridionale a gardé l’empreinte et les bienfaits de la centralisation salutaire qui lui fut imprimée sur les ruines de la féodalité germanique. Le code civil est en vigueur sur les bords du Rhin ; il y a des chambres représentatives à Munich, à Stuttgart, à Carlsruhe, à Darmstadt. Cette révolution constitutionnelle est devenue possible le jour où François Il a proclamé lui-même qu’il n’y avait plus d’empire d’Allemagne.

Tels sont les résultats. Quels furent les moyens ? Voilà le domaine de l’histoire proprement dite. L’histoire raconte les desseins, les entreprises des acteurs qui se produisent sur la scène ; elle apprend par quels procédés, par quels événemens, de grandes révolutions politiques et morales ont été préparées. Jusqu’à présent, parmi les moyens qui amènent ces mémorables résultats, la guerre a été au premier rang. Nous ignorons s’il viendra un temps où elle sera supprimée, où les difficultés qui partageront les nations seront résolues à l’amiable dans des congrès humanitaires. Jusqu’à présent les idées et les passions contraires qui ont sérieusement animé les peuples leur ont mis les armes à la main, et c’est après avoir beaucoup bataillé que les peuples ont goûté les douceurs de la paix. La révolution française avait dès le début proclamé son horreur pour les guerres de conquête et d’envahissement, et cependant, après s’être défendue héroïquement contre d’injustes agressions, elle se répandit au dehors avec une irrésistible impétuosité. Dans ce débordement, dans cette propagande de la victoire, il y a deux choses à admirer, les décrets de la Providence et le génie de l’homme qui en était l’instrument. Représentant de l’ordre en France, Napoléon fut pour le monde un agent extraordinaire de rénovations et de changemens. Il ne faut pas s’étonner s’il ne respecta pas les conditions et les lois d’équilibre de la politique suivie jusqu’alors, puisque c’était précisément sa mission de rapprocher, de fondre les peuples entre eux par des combinaisons nouvelles, et d’accélérer ainsi les progrès de la sociabilité européenne. Maintenant quelle est la nature et l’étendue du génie qui, par la Providence, fut voué à cette mission, quelles furent les inépuisables ressources de cette organisation privilégiée entre toutes, ses plans, ses projets, ses triomphes, ses mécomptes, ses fautes, ses revers ; quel fut l’homme enfin dans le détail de ses conceptions et de ses actes : c’est là un des plus grands tableaux qui puissent être présentés à l’admiration, à la curiosité humaine ; c’est là l’histoire dont M. Thiers s’est emparé avec tant de puissance, et qu’il continue avec une égale vigueur.

Dès les premières pages du sixième volume de l’Histoire du Consulat et de l’Empire, nous trouvons Napoléon tout entier au dessein d’une