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comme un revers de notre diplomatie. Le fils aîné de don Carlos lui-même n’a jamais été repoussé par nous, avant que l’opinion des cortès se fût prononcée contre lui. — Enfin les deux fils de l’infant don François, les derniers entrés en lice et qui y sont restés avec des chances presque égales, jusqu’au jour où le plus jeune, don Henri, duc de Séville, eut le tort inexplicable de proclamer ses prétentions en les mettant, par une lettre adressée à tous les journaux, sous la protection du parti qui faisait alors au gouvernement de la reine la plus vive opposition. Le gouvernement espagnol, en choisissant le duc de Cadix, n’a aucunement subi la loi du gouvernement français, il a agi dans le plein exercice de sa liberté ; mais il y a eu quelque clairvoyance et quelque fermeté de la part du cabinet français à renfermer dès le début cette question dans le cercle où elle est venue se résoudre définitivement. La préférence accordée à l’époux actuel de la reine n’a donné lieu, chez nous, à aucune polémique sérieuse. Il n’en a pas été de même du mariage du duc de Montpensier avec l’infante dona Louisa Fernanda : il a suscité des objections de plusieurs natures.

Ce mariage lie, dit-on, les destinées de la France à celles de l’Espagne d’une façon qui pourrait être fâcheuse pour nous et compromettre notre liberté d’action. J’avoue que cette objection me touche assez et me paraît d’un certain poids. Quelque confiance que je sois disposé à avoir dans le sort futur de l’Espagne ; persuadé, comme je le suis, qu’à travers même ses récens malheurs et ses présentes agitations elle a fait, depuis douze ans, plus de véritables progrès qu’elle n’en avait accompli depuis de longues années, je ne puis me dissimuler cependant que, d’ici à long-temps, nous aurons autant d’embarras que de services à attendre de cette nouvelle alliée.

Je serais donc peu porté à féliciter mon pays d’un événement qui rouvre devant lui de si grandes et si douteuses perspectives ; mais, ou je me trompe fort, ou le mariage du duc de Montpensier avec l’infante, sœur de la reine, était le corollaire nécessaire de l’union de la reine avec l’infant duc de Cadix. Le gouvernement, espagnol, obligé de renoncer en même temps au fils du roi de France et au prince de Cobourg, proche parent de la reine d’Angleterre, a senti le besoin de n’être pas laissé seul à ses propres ressources ; il a voulu se fortifier par ce mariage contre des difficultés qu’il devait prévoir. Si les choses se sont passées ainsi, le gouvernement français n’aurait pas eu tort d’accéder à cette exigence raisonnable de l’Espagne.

Mais, dit-on, le mariage du duc de Montpensier soulève des difficultés considérables. En donnant un mari français à une héritière du trône d’Espagne, il risque de placer un jour un prince descendant du roi des Français sur le trône d’Espagne, ce qui est positivement contraire au traité d’Utrecht. Le traité d’Utrecht a eu pour but de rendre tous les descendans