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venus à Paris pour présenter des réclamations auraient reçu du ministre de la guerre et du roi lui-même les assurances les plus propres à dissiper leurs inquiétudes. Dans ces derniers temps, l’ordonnance du 21 juillet a été l’objet, si nos informations sont exactes, de deux règlemens qui donnent à tous les propriétaires le temps qu’ils peuvent désirer pour la vérification des titres de propriété, comme pour la culture des terres. C’est surtout au sujet de la culture obligatoire des terres qu’une interprétation passionnée de l’ordonnance avait accrédité beaucoup d’erreurs. Les règlemens spécifient plusieurs cas dans lesquels la culture n’est pas exigée. Enfin on annonce qu’une commission, composée par moitié de représentans de l’administration et de représentans des colons, est instituée à Alger. Elle serait autorisée à pourvoir elle-même à toutes les difficultés imprévues, sauf avis immédiat à l’administration supérieure. Cette sage mesure a déjà eu l’heureux effet d’amener une scission parmi les colons mécontens, tant à Alger qu’à Paris. Plusieurs d’entre eux ont refusé de persévérer dans une opposition systématique au gouvernement. Ce n’est pas au reste l’activité qui manque à l’administration centrale des affaires de l’Algérie. Depuis un an, l’officier-général distingué qui la dirige, M. de la Rue, travaille avec zèle à satisfaire des intérêts qu’il apprécie mieux que personne. De nombreuses missions lui ont permis d’étudier l’Afrique, dans tous ses détails ; il l’a vue, il l’a parcourue en soldat, en administrateur. Le gouvernement comprend aujourd’hui la nécessité de favoriser par des mesures judicieuses le développement colonial ; il peut, il doit se montrer en Afrique législateur prévoyant. Seulement il ne faut pas oublier les difficultés d’une pareille tâche. L’administration a pu reconnaître elle-même, par les objections qu’a soulevées l’ordonnance du 21 juillet, combien toutes ces matières étaient chose épineuse et délicate. Il a fallu deux règlemens pour lever bien des doutes, pour aller au-devant de plusieurs interprétations fausses.

Les deux hommes qui ont dirigé la conquête de l’Algérie le comte de Bourmont et l’amiral Duperré, ont, par un singulier effet du hasard, disparu en même temps. Ce n’est pas le moment de discuter la vie militaire du premier, et de soulever des questions ardentes, que l’inflexible impartialité de l’histoire peut seule résoudre. Quant à l’amiral, il a laissé un nom populaire ; la France a pour ses marins illustres une prédilection véritable. Simple pilotin en 1773, capitaine de vaisseau en 1808, M. Duperré commandait, en 1809, la frégate la Bellone. Parti de France sur cette frégate pour se rendre dans les mers de l’Inde, il se fut bientôt, comme l’a dit un juge compétent, composé une division navale aux dépens de l’ennemi. Le combat du grand port, où quatre frégates anglaises cédèrent à deux de nos frégates, semble un épisode des campagnes de Suffren. Ce succès éclatant était plus qu’une victoire, c’était une grande et salutaire preuve que, sans la plus fatale imprévoyance, sans la plus incroyable succession de fautes et de malheurs, notre marine était faite pour sortir victorieuse d’une lutte où elle a failli périr. Sous l’empire, l’amiral Duperré a relevé dans l’Inde notre pavillon abattu ; sous la restauration, il a commandé devant Cadix ; enfin il a débarqué sur la plage d’Alger l’armée française qui devait commencer la conquête de l’Afrique. Depuis 1830, l’amiral Duperré fut naturellement appelé au ministère de la marine c’était sa place. Nous n’ajouterons