d’assez notables exceptions. Et quoique le congrès du Zollverein semble avoir, plus que celui des États-Unis, visé à la protection de l’industrie nationale, il est certain pourtant qu’il s’est préoccupé fortement de la question du revenu. L’union douanière allemande est donc en cela dans une situation analogue à celle de la république américaine ; aussi est-elle placée sur la même pente fatale. Les droits y sont actuellement modérés, et néanmoins le revenu qu’ils produisent n’est pas sans importance[1] ; mais, par les raisons que nous avons dites, ce revenu doit diminuer peu à peu, la source doit tarir. Pour le raviver, il faudra sans cesse exhausser les droits, et déjà de fortes tendances vers cet exhaussement se manifestent. Vainement la Prusse, mieux avisée ou plus prudente que la plupart des états associés, ou plus particulièrement touchée de la situation des provinces du nord dont l’agriculture souffre de ce régime, résiste-t-elle à ces tendances ; elle sera tôt ou tard entraînée par le torrent. Les droits s’élèveront donc, et comme il arrivera bientôt un moment où cet exhaussement même ne fera qu’amoindrir plus vite le revenu, en rendant l’importation des produits manufacturés plus difficile, si on veut continuer à percevoir ce revenu, on se verra de toute nécessité conduit plus loin.
Toutefois les pays compris dans l’association douanière allemande n’ont pas encore ressenti en général les mauvais effets de cette politique, parce qu’ils sont partis d’une situation pire que leur situation présente. Un certain nombre d’états, auparavant séparés par autant de lignes de douanes, s’étant associés pour ne former plus qu’une seule ligne commune à tous, ont en cela supprimé bien des entraves et agrandi le cercle de leur activité et, quoique le tarif général qu’ils ont adopté soit peut-être en somme plus rigoureux que le tarif antérieur de la plupart des états associés, le seul fait de leur fusion, qui est un grand pas vers la liberté relative, a plus que compensé, pour la plupart d’entre eux, le funeste effet de l’exhaussement de leur tarif. L’industrie y a fit des progrès, cela devait être. Ces progrès eussent été plus sensibles encore, si on n’avait pas commis l’énorme faute de frapper les fers de droits assez élevés[2]. Enfin la condition même du peuple s’y serait à coup sûr améliorée, si on n’y avait pas commis cette autre faute, encore plus grave, de taxer les denrées alimentaires telles que la viande et le blé. C’est à ces dernières mesures qu’il faut particulièrement attribuer les souffrances, trop réelles de certaines classes, et les désordres qui, en 1844, ont affligé plusieurs provinces.
Toute cette politique, qui consiste à favoriser exclusivement, par des lois restrictives, le travail manufacturier, a trouvé de brillans interprètes.