les Uberti et les Buondelmonti, à Pise les comtes et les vicomtes, à Pistole les Panciatichi et les Cancellieri, à Gênes les Doria et les Fieschi, les Fregoso, les Spinola, les Grimaldi, etc., à Rome enfin les Orsini, les Colonna, les Conti, les Savelli.
Les deux noblesses trouvaient une arène commode dans ces villes, gouvernées par des sénats de huit cents, même de deux mille personnes ; les rivalités héréditaires, le contraste des mœurs, la concurrence dans la magistrature, les élections républicaines, tout concourait à exaspérer des haines qui éclataient au moindre événement. Chaque tragédie domestique devenait une tragédie républicaine, témoin Imelda. Lambertazzi, Marchesella Torelli, le mariage de Buondelmonti, et mille drames poétiques du moyen-âge italien. Un meurtre, une vengeance, suffisaient à armer une moitié de la ville : à la nouvelle d’un assassinat, la grosse cloche de la commune, s’ébranlait, le podestat réunissait l’armée des corporations, et on marchait bannières déployées sur les maisons des coupables. Il fallait y mettre le siége : on les rasait, puis on exilait ceux qui échappaient au massacre Quelquefois des centaines de personnes du même nom devaient partir pour l’exil, tandis qu’un cierge brûlait sous une porte de la ville ; le cierge consumé, la mort menaçait ceux qui seraient restés. La pensée, on dirait presque l’idée unique des républiques italiennes, fut de trouver l’équilibre des deux castes : la plupart des républiques confièrent à des étrangers l’autorité dictatoriale des podestats ; quelques villes s’en remirent, pour le choix des chefs, à des élections compliquées à l’excès, où le hasard, invoqué souvent en dernier ressort, venait confondre les prévisions des partis. Parfois des compagnies se formaient, comme à Parme et à Bologne pour apaiser les deux castes, et d’autres associations s’organisaient aussitôt pour contrecarrer les premières. On partagea les emplois entre les deux noblesses a Milan, chacune d’elles élut son podestat. Tout fut tenté ; le clergé renouvela la trêve de Dieu sous des formes nouvelles et poétiques : tantôt il traîna devant les autels les familles rivales, tantôt il arracha les villes à la guerre en prêchant des pèlerinages Jean de Vicence réunit un jour dans la plaine de Paquara quatre cent mille hommes ; douze villes y parurent avec leur char de guerre pour entendre les prédications du moine et prêter un serment de paix. Au bout de quelques jours, la guerre recommençait.
Les communes avaient lutté d’abord contre les familles féodales, puis leur avaient imposé le séjour des villes. L’impossibilité d’équilibrer les deux castes jeta les républiques dans une troisième phase qui fut terrible. Tour à tour les deux castes se chassèrent d’une même ville. A Florence, les familles féodales, après l’exil des familles commerciales, en 1260, délibérèrent en plein conseil si elles devaient raser la ville et se réunir ailleurs. Crémone, en 1266, exilait dix mille citoyens