l’invasion et toutes destinées à se combattre : Pavie, la capitale lombarde, et Milan, la capitale romaine, se vouaient une haine implacable : il en était de même de Parme et de Plaisance, de Crême et de Crémone, de Padoue et de Vicence, de Reggio et de Modène, de Lugo et de Faenza. Presque toutes les cités italiennes étaient nées jumelles et ennemies. Essentiellement marchandes, militaires par nécessité, elles ne purent rester insensibles au spectacle de la vie féodale qui se développait autour d’elles, et bientôt on vit les municipalités italiennes se modeler sur les châteaux. Chaque commune réunit sous son drapeau les corporations des arts et métiers comme une milice ; elle les exerça par des tournois ; elle eut ses villes alliées et ses villes ennemies. A l’instar des chevaliers, les communes se donnaient rendez-vous pour se combattre : on ne voulait pas surprendre l’ennemi ; un mois auparavant, la cloche de guerre, qu’on appelait la martinella, annonçait la nuit et le jour le duel qui devait commencer. Dans ce chaos de guerres, les villes, tout en se déchirant entre elles, tournaient peu à peu les armes contre la féodalité des châteaux. Ici les artisans avaient à lutter contre des chevaliers bardés de fer, invulnérables comme des demi-dieux terribles dans la mêlée, insaisissables dans la retraite. Pour résister, la commune joua sa propre vie à la guerre ; elle monta sur le carrocio, immense char traîné par des bœufs, elle s’y établit avec son autel, se prêtres, ses livres, ses autorités et son drapeau, elle sortit des murs, les corporations entourèrent le char de la patrie, et la masse des artisans, transformée en une infanterie pesante, opposa au choc de la cavalerie féodale un rempart vivant hérissé de piques. La commune serait morte plutôt que de céder ; son char marchait lentement, mais il avançait toujours.
De progrès en progrès, les villes finirent par se trouver en présence de l’empereur et du pape. La guerre engendrait forcément la conquête, et les villes conquises, comme Lodi, réclamaient auprès de l’empereur ; la puissance des communes alarmait les représentans de la grande féodalité, et, tandis que cette force nouvelle froissait l’autorité impériale, la ville de Rome menaçait les papes ; un pontife, Lucius, était assassiné par l’émeute ; Arnaldo da Brescia tonnait contre les usurpations du clergé. Une réaction, à la fois pontificale et impériale, était inévitable ; les deux pouvoirs tombèrent d’accord. Adrien IV et Frédéric Barberousse renouvelèrent le pacte de Charlemagne et d’Othon Ier. Cette sorte de restauration féodale eut de terribles résultats pour les communes. Frédéric rasa Milan, dévasta plusieurs villes ; il réclama tous les droits antiques, il se proclama le maître absolu. Il s’était trompé de date et de pays : il venait trop tard pour restaurer la grande féodalité, et il était en Italie. Les villes se réunirent devant le danger commun ; le pape Alexandre III, ayant eu des différends avec l’empereur, les tourna