peintre, d’une intelligence plus subtile que vaste, et chez qui la réflexion l’emportait sur le goût et le sentiment, s’occupa d’abord tout autant de concilier que de réformer. A l’en croire, l’artiste par excellence devait réunir le dessin de Raphaël au coloris du Titien et à la grace du Corrège. Raphaël Mengs s’efforça de joindre l’exemple au précepte, mais ses compositions, dénuées de puissance et de personnalité, accusent le vice de son système. Mengs ne fut qu’un habile arrangeur et un hardi copiste. Son plafond à la fresque de la villa Albani, où il a représenté le Parnasse, offre une reproduction des plus belles statues antiques que la couleur n’a pas suffisamment animées. Mengs enjoliva l’antiquité, et il existe une singulière analogie entre ses peintures de la villa Albani, du Vatican, son Cupidon aiguisant une flèche du musée de Dresde, et les tableaux de quelques-uns des peintres de l’école impériale, ceux surtout qui recherchèrent la grace, Girodet, Guérin et Meunier par exemple. David fut plus sévère que Mengs et d’une imagination bien autrement vigoureuse. Canova, dont le talent a quelques points de ressemblance avec celui du peintre de Dresde, fut un plus beau génie. Canova marque le passage du Bernin aux statuaires d’aujourd’hui ; Raphaël Mengs est la transition de Piètre de Cortone et de Solimène à David et à son école. Le premier mérite du peintre saxon est d’avoir remis en honneur la forme sacrifiée au mouvement et à l’effet théâtral, et d’avoir remplacé l’abondance et la richesse confuse de ses prédécesseurs par une simplicité parfois un peu nue. Mengs indiqua le premier cette nouvelle façon d’envisager l’art, que Winckelmann, son disciple enthousiaste, a poétiquement développée dans son Histoire de l’Art chez les anciens. L’empire que Mengs exerça sur l’écrivain alla jusqu’à fausser son goût et à égarer son jugement. Raphaël Mengs semble avoir réalisé l’idéal de Winckelmann, car celui-ci le proclame le plus grand peintre de son époque, et affirme que peut-être il ne sera jamais surpassé. « Mengs (à l’entendre) naquit, comme le phénix, des cendres de Raphaël, son devancier ; il fut destiné à faire connaître au monde la véritable beauté dans les arts, et à s’élever dans son vol à la plus grande hauteur qu’il soit donné à l’homme d’atteindre. » Voilà bien l’emphase ordinaire de l’historien de l’art chez les anciens.
Asmus Carstens, qui ne visita l’Italie que vingt ans après Raphaël Mengs, se prononça plus énergiquement encore que le peintre du Parnasse pour un retour vers l’antique et vers l’époque de Raphaël. Il fut le précurseur de l’école allemande dont MM. Overbeck et Cornélius sont les chefs. Carstens proclama long-temps avant M. Ingres que l’école des Carraches ne fut pas une école dans l’acception du mot, et que ces peintres ont, les premiers, commencé la décadence. Nourri des doctrines de Winckelmann, il les modifia dans l’application avec intelligence,