des querelles particulières, des collisions où se trouvaient agitées les plus grosses questions du droit des gens. Ajoutez à cela le rôle essentiellement actif, turbulent, des intérêts privés en souffrance, et, loin de s’étonner que les négociations n’aient pu aboutir, on aura plutôt peine à comprendre que de cette mêlée d’intérêts contraires il ne soit pas résulté les plus graves complications.
L’affaire de la Leopoldina ne jette pas moins de lumière sur la mauvaise foi du gouvernement brésilien et des autorités locales que sur l’arbitraire et le zèle excessif des croiseurs anglais ; elle révèle aussi sur quelle échelle, en dépit de toutes les entraves, s’exerçait la traite. Le 26 novembre 1843, la Leopoldina, négrier brésilien, mais portant le pavillon portugais et ayant à son bord huit cents esclaves, poursuivi par le croiseur anglais le Partridge, vint se jeter à la côte sous le canon de Macahé. Aux termes des traités, les croiseurs de la marine britannique ne peuvent procéder à la visite d’un navire dans les eaux brésiliennes. Néanmoins le capitaine du Partridge dirigea ses embarcations sur la Leopoldina ; mais quand elles approchèrent du négrier échoué, qui venait de mettre ses esclaves à terre, l’officier commandant de Macahé leur ordonna de rétrograder, et ses soldats mirent en joue l’équipage des embarcations. Le capitaine anglais vint aussitôt à terre pour se plaindre que les autorités locales eussent permis le débarquement des esclaves, et qu’elles eussent souffert que les embarcations du Partridge fussent menacées sur la côte d’un pays allié. De leur côté, les autorités de Macahé prétendirent que le capitaine du Partridge, en cherchant à visiter un navire placé sous le canon d’un fort, avait enfreint le traité et avait commis une insulte à la nation brésilienne, insulte qui ne pouvait être trop rigoureusement réprimée. Voici en quels termes s’exprimait à ce sujet le résident anglais, M. Hamilton, dans une lettre adressée à lord Aberdeen à la date du 22 décembre : « Les pièces jointes à ma lettre, disait-il, démontrent suffisamment la complicité des autorités civiles et militaires de Macahé dans les opérations de la traite des noirs ; elles prouvent également que, malgré les efforts de la légation et de l’escadre britanniques, il y a peu de chances d’obtenir l’exécution du traité conclu entre l’Angleterre et le Brésil pour la suppression de ce trafic. D’un autre côté, on ne peut mettre en doute la mollesse avec laquelle le gouvernement de ce pays recherche les auteurs de ces transgressions. Cette mollesse peut être considérée comme une complicité directe. Ma correspondance a dû convaincre votre seigneurie du peu de cas que le gouvernement brésilien fait des réclamations relatives à la traite des noirs. La dernière note du ministre des affaires étrangères, M. Aureliano, au sujet de la Leopoldina, est une nouvelle preuve de ce dédain. Il est dit dans cette note que ce navire est entré dans la rade de Macahé pour réparer quelques avaries et