avait besoin de la neutralité du Danemark, ces traités ont eu pour premier effet l’irrévocable échange de la partie grand-ducale du Holstein contre les comités d’Oldenbourg et de Delmenhorst, aujourd’hui domaines inviolables des grands-ducs d’Oldenbourg. Le tzar pourrait-il, en droit, mettre la main sur le Holstein sans qu’on rendît au Danemark les territoires dont celui-ci a payé son acquisition ? Le tzar pourrait-il se prévaloir du droit de masculinité, quand l’ordre de succession réglé pour la maison impériale en 1788 est absolument incompatible avec l’ordre de succession dont il voudrait bénéficier en Holstein ? Ces prétentions tomberaient évidemment du premier coup devant la résistance de tous les cabinets, et néanmoins il est certain qu’élevées par un état aussi puissant vis-à-vis d’un état aussi faible, elles ont une influence très grave sur situation. C’est là comme une inquiétude continuelle pour le Danemark, et la Russie voudrait, bien entendu, la prolonger, ou vendre au prix qu’il lui plairait l’espoir d’un désistement. N’est-ce donc pas alors la vraie politique du Danemark et de l’Allemagne elle-même de mettre un terme à cette fausse position ? N’est-ce pas le bien commun que l’intégrité de la monarchie danoise soit enfin proclamée pour tous et par tous ? Les Teutons, si mal à propos ressuscités, s’obstineront-ils à fermer les yeux ?
Il est enfin un dernier motif qui pousse l’Allemagne dans cette discussion, et celui-là certes est le bon ; mais, à vrai dire, il ne regarde qu’elle. Ce n’est plus ici question de droit, question de sentiment, question de politique générale ; c’est purement et simplement une question de politique allemande, de commerce allemand. De ce point de vue-là, l’Allemagne a raison de se mettre en colère contre le Danemark ; elle ne peut que gagner à lui faire peur ou à le faire céder. L’avenir du Zollverein est réduit à néant, s’il ne parvient à s’assurer des débouchés maritimes plus larges que ceux qu’il possède aujourd’hui : l’ouverture de la succession danoise a semblé l’occasion providentielle de cet agrandissement. On serait sans doute bien triste de voir à Kiel les vaisseaux de guerre de la Russie, aussi triste, écrit le correspondant de M. Arndt, qu’on peut l’être de voir les canons français sur les murs de Strasbourg ; mais il y aurait pourtant un désespoir plus vif, ce serait de lâcher, au moment où l’on croit les saisir, ces ports du Schleswig et du Holstein si magnifiquement placés pour servir les destinées de l’union douanière, pour permettre aux Allemands d’avoir une force navale et de toucher enfin la mer, le seul endroit où se batte encore le monde. Les ports prussiens de l’est sont une maigre fortune ; les séparatistes de l’ouest ne veulent point venir à résipiscence ; au centre de ce vaste littoral, objet d’une si ardente convoitise, Hambourg et Lubeck maintiennent leur indépendance malgré la petite guerre qu’on leur fait et