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LA


POESIE ALLEMANDE


ET L'ESPRIT FRANCAIS.




I. Écrivains et Poètes de l’Allemagne, par M. Henri Blaze.
II. Le Faust de Goethe, traduction complète par le même.




La poésie a le double caractère d’une langue universelle et d’un idiome national. Dans chaque homme, il y a le germe des sentimens et des idées dont le développement fait les grands poètes : aussi de belles images, des mots partis du cœur, des pensées profondes ou sublimes, auront la puissance d’émouvoir les esprits les plus simples et les moins cultivés. L’ame humaine répond à l’ame humaine ; elle tressaille en reconnaissant dans des traits qui l’enchantent ce qu’elle porte en elle-même de plus intime et de plus vrai. Cependant, à côté de cette sympathie, il faut signaler un effet contraire et non moins réel. Suivant les temps, suivant les lieux, la poésie, cette divine essence des choses, revêt des formes, une expression diverses, et cette variété, qui est une richesse, devient une cause de séparation et de mésintelligence non moins entre les individus qu’entre les nations. Dans un même pays, l’inégalité d’éducation ne permettra pas à beaucoup d’esprits de se plaire aux beautés délicates d’un art savant et réfléchi. Des peuples, en jetant l’un sur l’autre des regards de dédain, ont méconnu long-temps