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entre les deux grandes divisions de la création animée, et, par l’étude des plantes ou des animaux fossiles ensevelis dans les divers terrains, resserrèrent les liens que la physiologie avait établis entre les sciences naturelles et les sciences physiques. Seule isolée dans ses hauteurs sublimes, l’astronomie sembla long-temps ne donner la main qu’aux mathématiques. Tout au plus tenait-elle à la physique par l’emploi de ces verres puissans qui annulent les distances. Cependant aujourd’hui elle demande encore à cette science les moyens de reconnaître les modifications subies par la lumière que les astres gravitant dans l’espace envoient jusqu’à nous, et arrive par là à des conjectures très probables sur la nature de ces corps ; elle retrouve dans la lune la trace de convulsions analogues à celles que la géologie a signalées sur notre planète ; elle explique et calcule à l’avance ces mouvemens de la mer qui, sous le nom de marées, sont un des plus grands et des plus étranges phénomènes offerts à l’observateur à la surface de notre planète.

On le voit, les philosophes n’avaient pas entièrement tort. Toutes les sciences se tiennent par la main, et, sans perdre leur individualité propre, se font les unes aux autres des emprunts chaque jour plus importans, plus nécessaires. Au point où nous sommes déjà parvenus, nul ne peut être véritablement distingué dans la partie de nos connaissances qu’il a choisie pour objet de ses études, nul ne peut comprendre toute la portée de la science qu’il cultive, s’il n’a au moins des notions générales sur la plupart des autres. Quiconque se renferme étroitement dans sa spécialité se condamne volontairement à l’insuffisance sur plusieurs points, à la médiocrité sur tous.

S’il est une science qui exige ce savoir presque universel, c’est sans contredit celle qui, prenant notre globe tout entier pour champ de ses études, cherche à se rendre compte des phénomènes accomplis journellement dans cet immense laboratoire, c’est la physique générale du globe. Toujours chère aux esprits spéculatifs et trop long-temps appuyée sur de pures hypothèses, cette science a subi la loi commune : elle marche appuyée sur l’expérience et l’observation ; mais on comprend que ses progrès ne sauraient être rapides. Ici, l’activité, le génie inventif de l’homme, ne peuvent s’exercer que dans des limites restreintes, et plus que partout ailleurs le temps est un des élémens nécessaires à l’acquisition des faits. Cependant on peut dire avec raison que depuis les premières années de ce siècle la physique générale du globe a fait de remarquables progrès. Se caractérisant chaque jour davantage, et étendant sans cesse ses conquêtes, elle a même franchi déjà les limites de notre planète et préparé les voies à une science bien plus vaste encore, à la physique générale de l’univers.

Malheureusement les matériaux relatifs à ces sciences ne formaient pas encore un corps d’ouvrage. Disséminés dans des traités spéciaux,