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ministre des travaux publics est un esprit trop éclairé pour n’être pas parfaitement fixé, par exemple, sur la meilleure direction à donner au chemin de la Méditerranée au Rhin, et pour ne pas approuver entièrement la substitution du tracé par la vallée de l’Ognon à celui qu’il s’était trouvé dans le cas de proposer par la vallée du Doubs ; on peut compatir aux sollicitudes électorales de MM. Clément, Véjux, de Magnoncourt et Parandier, sans pour cela fermer les yeux à l’évidence, et sans méconnaître les avantages d’une direction moins dispendieuse et plus courte, qui aura le double effet de desservir de nombreux intérêts et de protéger la ligne de fer contre les incursions de l’ennemi en cas de guerre. Nous sommes persuadés que, dans la question vivement débattue du chemin de Saint-Dizier à Gray, M. Dumon est également de l’avis de la chambre beaucoup plus que du sien, et qu’il reconnaît la convenance de faire exécuter par une compagnie une direction placée en dehors du système général de la loi du 11 juin 1842, et qu’il proposait de faire exécuter aux frais de l’état. Enfin nous tenons pour certain que, si M. le ministre des travaux publics a refusé d’appuyer pour le chemin du Mans à Laval le tracé par Sillé-le-Guillaume, proposé par M. Boudet, l’honorable député d’Agen s’est félicité, dans son for intérieur, de voir prévaloir une direction qui abrége de 10 kilomètres la distance de Rennes à Paris : sorte de compensation qui était assurément bien due à ces populations de l’ouest auxquelles on impose le passage par Le Mans et Chartres au détriment de leur route naturelle et traditionnelle par Dreux, Verneuil et Alençon. Les mécomptes politiques qu’a pu éprouver M. le ministre des travaux publics sont donc au fond de véritables victoires, et il lui aura été facile de s’en consoler. Quoi qu’il en soit, cette grande discussion est terminée de la manière la plus avantageuse aux intérêts généraux de l’état ; et, si le gouvernement et les chambres avaient été aussi heureux dans le mode d’exécution qu’ils l’ont été dans la disposition des tracés, le pays n’aurait que de justes félicitations à leur adresser. Malheureusement il n’en est point ainsi, et plus nous avancerons dans la confection du réseau, plus nous comprendrons quelles difficultés s’est créées la France en aliénant à des compagnies financières, pour une moyenne de plus de soixante ans, la propriété de toutes les grandes voies de circulation établies dans le royaume.

Le rapport du budget, distribué pendant le débat des chemins de fer, a dirigé toutes les pensées vers le vote des lois de finances et vers les intérêts qui s’y rapportent. C’est en ce moment la principale préoccupation de la chambre. Le travail de M. Bignon éclaire notre situation tout entière, et, sans provoquer de vives alarmes, il doit assurément donner lieu aux méditations les plus sérieuses. Nous allons essayer de résumer en quelques lignes le bilan présenté par la commission chargée de préparer le budget de l’exercice 1847.

Personne n’ignore qu’il existe un découvert de 256,039,935 francs, antérieur à 1840, qui a pris le nom d’arriéré, et que supporte la dette flottante. Les découverts postérieurs à l’exercice 1840 forment la somme de 305,319,376 fr., ce qui fait monter le total des découverts certains, jusque et y compris 1844, au chiffre de 561,359,311 fr. L’exercice 1845, compensation faite des dépenses imprévues et d’un excédant de recettes qui dépasse de plus de 46 millions les prévisions normales, laisse un découvert de 9,016,135 fr. Le découvert de l’exercice 1846, malgré une augmentation probable des recettes de plus de 22 millions, paraît