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prédominer toujours, puisqu’une partie des électeurs était à sa nomination. Enfin il maria son fils avec une princesse d’Altenbourg, comme pour nier plus hardiment et ruiner même dans l’avenir les espérances de la maison de Cambridge, qui avait refusé son assentiment à la contre-révolution dont elle était la première victime. On se rappelle l’irritation que causèrent d’abord ces violences ; j’ai assez expliqué comment elle a naturellement cessé. Les députés de 1841 protestèrent bien encore par un dernier élan ; leur adresse était même d’une vigueur remarquable. « Il n’y a, disaient-ils, qu’un petit nombre parmi les sujets sincèrement dévoués au trône qui croie à la légalité et à l’urgence de toutes les mesures prises depuis le 1er novembre 1837 pour annuler la constitution de 1833 ; il n’y a qu’un petit nombre qui admette que les élections de 1838, 1839 et 1840, sorties elles-mêmes de cet état de choses, aient pu lui donner quelque droit et quelque fixité. » Malheureusement cette énergie n’avait plus alors ni d’imitateurs ni d’échos ; la première chambre ne voulut point s’associer à la seconde, et tout le pays, excepté Goettingue, où l’on souffrait davantage de ce régime tyrannique, s’est insensiblement habitué à l’obéissance.

Il est cependant beaucoup d’intérêts négligés à force de lenteurs administratives, beaucoup de besoins méconnus à force de méfiances pour cette ombre de pouvoir parlementaire qui semble encore subsister. Ainsi, par exemple, les chambres formulent des vieux et votent des fonds pour l’accroissement de l’instruction primaire, le gouvernement n’exécute rien. La seule industrie qui puisse peut-être prospérer dans le pays, c’est la fabrication du fil et de la toile ; mais le roi n’a pas grande envie de faire concurrence à l’Angleterre, et professe comme maxime suprême que le Hanovre est et doit rester purement agricole : malgré les instances et les offres des députés, il ne se presse ni d’aider ni de protéger ces ateliers naissans. On n’est pas plus soigneux du bien des campagnes, si dévoué qu’on se dise aux populations rustiques ; on laisse debout tous les vieux abus qui survivent là comme y survit toujours le calendrier julien. Il n’y a de législation obligatoire ni pour les cours d’eau, ni pour les défrichemens, ni pour les pâtures ; le gouvernement paraît uniquement préoccupé de fortifier la propriété aristocratique, ébranlée par la constitution qu’il a détruite sans en pouvoir supprimer tous les effets ; il voudrait revenir sur les concessions accordées aux paysans à partir de 1833, et, s’il ne rétablit point les dîmes et les corvées, il s’y prend de son mieux pour que les anciens seigneurs regrettent moins leur dépossession. Les charges publiques ne sont point également réparties, et, tandis qu’il demande aux pauvres l’emploi de leur temps et de leurs bras pour l’entretien des routes, il s’abstient, sous un prétexte ou sous l’autre, d’imposer les contributions pécuniaires auxquelles la charte de 1833 soumettait en compensation les anciens