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certaines propriétés de la lumière à la détermination de la quantité de sucre cristallisable qui se trouve dans certains mélanges. Sans examiner ici le mérite de ce procédé, dont l’emploi exige des précautions fort délicates, nous dirons que ce n’est pas sans quelque surprise que nous avons remarqué l’absence du nom de M. Biot dans des écrits où cette application était recommandée à l’industrie. Il est bon du reste d’ajouter qu’en Allemagne les fabricans emploient, depuis quelque temps, un instrument de M. Mitscherlich, fondé sur les mêmes principes, et qui paraît d’un emploi facile et suffisamment exact.

L’Institut vient de faire une grande perte. M. Bessel, l’un des huit associés étrangers de l’Académie des Sciences, est mort à Koenigsberg le 17 mars dernier. Cet illustre savant, que les astronomes de l’Europe avaient reconnu pour leur chef, était, chose rare, aussi supérieur dans la pratique des observations que dans la connaissance des hautes théories mathématiques. Il ne semblait pas d’abord destiné à la carrière des sciences : ce fut par l’influence de M. Olbers que M. Bessel abandonna le commerce pour embrasser l’étude de l’astronomie. Nous le répétons, la science et l’Institut ont fait une grande perte. C’est probablement dans la prévision d’un tel malheur que quelques-uns de nos savans avaient facilité dernièrement à M. Demidoff, si connu pour ses richesses, l’entrée de l’Académie des Sciences… Et il y a encore des gens qui prétendent que les écus n’ont pas d’esprit !

La Revue a déjà eu l’occasion de parler en détail des manuscrits de Fermat et de la nouvelle édition des œuvres de cet illustre géomètre, entreprise par ordre du gouvernement. La ville de Toulouse ne pouvait pas rester indifférente à l’annonce de cet hommage rendu à la mémoire d’un homme dont la gloire est indissolublement liée à celle de cette antique cité. Le conseil municipal de Toulouse a décidé qu’un monument serait élevé dans cette ville à Fermat, et qu’une grande souscription nationale, à laquelle ce conseil a commencé par contribuer pour 25,000 francs, serait ouverte dans toutes les villes de France. Nous nous associons de grand cœur à une telle manifestation, au succès de laquelle nous ne manquerons pas de contribuer de toutes nos forces quand il y aura lieu. D’intéressantes trouvailles ont été faites, dans ces derniers temps, au sujet de Fermat. Non-seulement son origine et sa biographie ont été éclairées par des recherches entreprises avec zèle et persévérance dans les archives de la ville de Beaumont de Lomagne, mais le nombre des écrits inédits de ce grand mathématicien a été notablement augmenté par les soins de M. Despeyrons. Ce jeune savant, envoyé l’année dernière à Vienne sous les auspices de M. le ministre de l’instruction publique et de M. le ministre des affaires étrangères, dans la vue de découvrir de nouveaux manuscrits de Fermat, a rempli sa mission avec un succès digne de la confiance que le gouvernement lui avait témoignée.

Pendant que la France rend un tel hommage à la gloire d’un des plus beaux génies qui l’aient illustrée, l’Allemagne s’apprête à tirer de l’oubli les manuscrits de ce grand Kepler dont les malheurs ne se terminèrent pas avec la vie. C’est un particulier, le professeur Frisch de Stuttgard, qui a eu le courage d’entreprendre l’œuvre gigantesque, si souvent annoncée sans effet, de réunir et de publier ensemble tous les ouvrages, inédits ou déjà imprimés, de cet homme célèbre. Un tel projet, que nous espérons voir bientôt réalisé, mérite l’approbation et le concours de tous les amis des sciences. Il est vivement à souhaiter que