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rencontré obliquement, comme nous l’avons dit tout à l’heure, la première glace, est reflété de haut en bas dans la direction de la verticale, il sera réfléchi de nouveau par le second miroir, et portera à l’œil d’un observateur placé comme il faut l’image de l’objet d’où émane le rayon lumineux. Imprimons actuellement un mouvement horizontal de rotation assez lent à la table, et par conséquent à la glace placée sur cette table. Il semblerait que, si l’observateur suit exactement le mouvement de la table en tournant avec elle, l’image qu’il avait vue d’abord ne le quittera plus, et pourtant il n’en est rien. Cette image paraîtra et disparaîtra à chaque quart de révolution. Le phénomène devient plus net si, au lieu d’employer des glaces non étamées, on se sert de lames de verre noir. Un tel phénomène constitue ce qu’on appelle la polarisation de la lumière. Cette belle découverte de Malus a donné naissance, dans ces derniers temps, à une des branches les plus attrayantes et les plus difficiles de la physique.

Nous ne pousserons pas cette exposition plus loin. Il suffira de dire qu’une telle propriété de la lumière, que cette polarisation se produit dans une foule de circonstances diverses, et que les rayons lumineux se polarisent non-seulement à la surface des corps par réflexion, mais aussi en traversant certains corps diaphanes par réfraction. Tantôt cette polarisation se manifeste par des modifications dans l’intensité de la lumière, tantôt elle se rend sensible par des changemens de couleur. Dans les expériences de M. Faraday, il arrive que des rayons polarisés, traversant des corps diaphanes qui ordinairement ne leur font éprouver aucune modification, sont sensiblement modifiés lorsque, dans le voisinage de ces corps, on place des aimans très puissans. Les aimans qu’il faut employer dans ces recherches ne sont pas de ces aimans naturels que tout le monde connaît ; ce sont des corps qui ne deviennent magnétiques que sous l’influence de certains courans électriques découverts en Danemarck par M. Oersted, et dont M. Ampère a donné chez nous une savante théorie. Pour faire mieux comprendre, par un exemple, en quoi consiste l’observation fondamentale de M. Faraday, il suffira de dire qu’on en prendrait une idée assez plausible si l’on imaginait qu’en plaçant un aimant dans le voisinage d’une carafe qui, exposée aux rayons du soleil, produit cette espèce de petit arc-en-ciel si cher aux enfans, on pourrait modifier les couleurs ou la position de cet iris. Transportez aux rayons polarisés ce qui arriverait ici pour les rayons réfractés, changez les aimans ordinaires en électro-aimans, et vous aurez l’expérience de M. Faraday que nous avons essayé de faire comprendre à nos lecteurs, et que M. Pouillet a eu le mérite de répéter le premier et de modifier ingénieusement, d’après des indications fort obscures qui étaient arrivées sur le continent. Si ces indications n’ont pas été plus complètes, c’est que M. Faraday avait cru d’abord que l’influence des aimans s’exerçait directement sur les rayons lumineux, ce qui renverserait toutes les idées reçues dans la science, et que trouvant, chez la plupart des physiciens, de l’opposition à ses idées théoriques, il a probablement voulu répéter ses expériences avant de les livrer au public. Les nouvelles recherches ne paraissent avoir nullement modifié sa manière de voir. C’est du moins ce qui résulte de son mémoire imprimé, dont quelques exemplaires viennent d’arriver à Paris.

Au reste, une telle question ne tardera pas à être discutée à fond par des physiciens qui possèdent la confiance de toute l’Europe. M. Biot a commencé à la