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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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14 avril 1846.


La semaine qui vient de s’écouler a été peu politique. Pendant que le monde religieux se précipitait dans les temples, et que, par un reste d’habitude, le monde élégant allait se montrer à Longchamps, les chambres faisaient relâche comme les théâtres. Un débat d’une haute importance vient de ramener cependant sur les travaux parlementaires l’attention publique, distraite par l’approche du printemps et par l’imminence de la dissolution.

On se rappelle qu’en se séparant l’année dernière, la chambre, après une discussion des plus vives, avait prescrit, par un article supplémentaire à la loi de finance, la publication d’un compte rendu complet des ressources et des besoins de notre établissement maritime, dont les misères venaient d’être révélées à la tribune par les orateurs de l’opposition et par des membres même de la majorité. C’était prendre implicitement l’engagement formel de subvenir par de suffisantes allocations à tous les besoins qui pourraient être constatés. Pour se conformer à ce vœu, revêtu de la sanction législative, M. de Mackau, ministre de la marine, a fait distribuer aux deux chambres, à l’ouverture de la session, un rapport au roi, dans lequel il s’attache à expliquer par l’exagération des armemens les déficits existans sur le matériel naval et les approvisionnemens de nos arsenaux. On ne saurait méconnaître la vérité de cette observation : les circonstances ont contraint la France, depuis dix années, à des armemens excessifs, qui ont eu pour résultat d’absorber les crédits mis à la disposition de la marine, quelque élevés que ces crédits pussent être, et d’amener une usure de nos bâtimens et un épuisement désastreux de notre matériel. On comprend que, lorsque nous avions sur la flotte un personnel qui s’est élevé jusqu’à trente-deux mille marins, il était impossible de maintenir les constructions au niveau de l’effectif réglementaire déterminé par les ordonnances royales, même avec un budget de 105 millions. C’est à ce péril que la chambre a entendu pourvoir, en mettant le matériel à flot et en chantier, par une large allocation extraordinaire, au niveau des besoins qui seraient constatés.

M. l’amiral de Mackau a évalué ces besoins de la manière suivante : acceptant les supputations de la commission spéciale présidée par M. le prince de Joinville,