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détails, une réforme administrative qui demanderait à être vue de plus haut et abordée avec plus d’ensemble. Ainsi, pour simplifier la surveillance et l’entretien des routes vicinales, qui dépendaient, en Angleterre seulement, de seize mille administrations locales, le premier ministre propose de réduire le nombre de ces commissions à cinq cents, en étendant le cercle dans lequel s’exercera leur autorité. Il diminue aussi le poids de la taxe des pauvres pour la propriété foncière, en décidant que les manufacturiers ne pourront plus, dans les temps de crise, repousser vers les paroisses rurales leurs ouvriers malades ou épuisés par le travail et par l’âge, et que cinq années de résidence dans une ville industrielle donneront droit aux secours que cette ville est tenue de distribuer.

Arrivons cependant à la partie du projet qui en est à la fois l’essence et la base, et sur laquelle seule paraît devoir porter le débat. Sir Robert Peel propose d’abolir les droits établis à l’importation des grains étrangers ; mais la suppression de ces droits ne sera pas immédiate. Le projet de loi réserve, en faveur des propriétaires intéressés au régime actuel, et pour dernière consolation, un délai de trois années. Il y a néanmoins une première réduction dans le tarif, réduction applicable à cette période triennale. Les droits, qui, selon le système de 1842, pouvaient s’élever à 22 shillings par quarter, sont renfermés entre une limite maximum de 10 shillings et une limite minimum de 4 sh., de telle sorte que le prix du blé n’excède jamais 58 shillings le quarter, soit à peu près 25 francs l’hectolitre.

Ce système apportera un soulagement réel à la situation de l’Angleterre. Il en résultera une diminution immédiate de 9 à 10 shill. dans la quotité des droits perçus à l’importation des grains étrangers l’introduction des blés sera donc immédiate et abondante ; mais ce droit de 4 shillings par quarter, qui ne pèse que faiblement sur le consommateur, tant que le prix du blé se maintient entre 50 et 60 shillings, ne pourrait plus être perçu dans le cas où le blé atteindrait des prix de famine. C’est là le principal défaut du projet ; sir Robert Peel fait la loi à une époque de disette, comme il la ferait pour une époque d’abondance, et le seul cas à prévoir est précisément celui que le ministre néglige.

Que feront maintenant les partis en présence de ce projet, qui est défectueux à beaucoup d’égards, et qui ne satisfait complètement personne ? Sir Robert Peel, avec un courage que lui commande sa position, insiste pour que la difficulté des céréales soit vidée avant toute autre, et déjà le débat vient de s’ouvrir, au bruit des pétitions qui