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La lutte est décidément engagée, et le sang coule ; partout où les puritains de Cromwell font leur apparition, les cavaliers de Charles Ier sont mis en fuite. Les bulletins du fermier-colonel, homme d’ordre et qui, rentré dans ses logemens, écrit exactement ce qui s’est passé, sont fort nombreux ; nous ne citerons que les premiers en date, remarquables par la clarté du détail et la simplicité de la diction.

Au comité de l’association, séant à Cambridge.

« Huntingdon, 31 juillet 1643.

« MESSIEURS,

« Il a plu au Seigneur d’accorder à votre serviteur et à vos soldats une victoire importante à Gainsborough. Mercredi, après avoir pris Burley-House, je marchai sur Grantham, et là je joignis environ trois cents chevaux et dragons de Nottingham. Outre ceux-ci, nous rencontrâmes, le jeudi soir, comme il était convenu, les hommes de Lincoln à North-Scarle, à environ dix milles de Gainsborough. Là nous nous sommes reposés jusqu’à deux heures du matin, et alors nous nous sommes mis tous en marche pour Gainsborough.

« A environ un mille et demi de la ville, nous rencontrâmes un poste avancé ennemi d’environ cent chevaux. Nos dragons essayèrent de les repousser ; mais l’ennemi ne mit pas pied à terre, les chargea et les força de se replier sur le corps principal. Nous avançâmes jusqu’au pied d’une colline escarpée ; nous ne pouvions la gravir que par des sentiers ; nos hommes essayèrent, et l’ennemi s’y opposa, mais nous réussîmes et gagnâmes la crête de la colline. Cela fut exécuté par les Lincolniens, qui formaient l’avant-garde.

« Quand nous eûmes tous atteint le haut de la colline, nous vîmes un corps nombreux de cavalerie ennemie devant nous, à environ une portée de mousquet ou plus près, et une bonne réserve d’un régiment entier de cavalerie derrière. Nous nous occupâmes à mettre nos hommes en aussi bon ordre que possible. Pendant ce temps, l’ennemi avança sur nous pour nous prendre à notre désavantage, mais, quoique peu en ordre, nous chargeâmes leur corps principal. J’avais l’aile droite. Nous vînmes cheval contre cheval, et nous travaillâmes de l’épée et du pistolet un assez joli espace de temps (a pretty time), les deux partis gardant leurs rangs serrés, de sorte que l’un ne pouvait pas entamer l’autre. A la fin, ils plièrent un peu ; nos hommes s’en aperçurent, se précipitèrent sur eux, et mirent immédiatement le corps entier en déroute, les uns fuyant à gauche, les autres à droite de la réserve ennemie, et nos gens les poursuivirent et les sabrèrent pendant cinq ou six milles.

« Ayant remarqué ce corps de réserve immobile et ferme, j’empêchai mon major, M. Whalley, de les suivre ; et avec mon propre escadron et le reste de mon régiment, en tout trois escadrons, nous nous réunîmes en un seul corps. Dans cette réserve était le général Cavendish. Un moment il me fit face ; dans un autre instant, il avait en tête quatre escadrons de Lincoln :