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Quoique appartenant à la classe la moins aisée de nos campagnes, les nourrices que reçoit la Maternité sont, nous devons le dire, d’une qualité peu inférieure à celle des nourrices ordinaires. Les enfans trouvés placés à la campagne ne sont donc pas, en général, plus maltraités que d’autres ; ils sont seulement soumis aux chances d’un partage qui établit entre eux des inégalités de bien-être, selon qu’ils échoient à des mains dures ou nécessiteuses, ou qu’ils sont mis en nourrice dans des familles aisées.

Les bâtimens de la Maternité logent, en toute saison, seize à vingt femmes de la campagne qui attendent des nourrissons. Après un séjour de courte durée dans l’établissement, elles retournent dans leur pays, emmenant avec elles l’enfant que l’administration leur délivre. Pour ces nourrices, comme pour le nouveau-né qu’elles emportent à leur sein, l’hospice n’a donc été absolument qu’un lieu de passage. L’éloignement du pays où elles se rendent étant, comme nous l’avons vu, un inconvénient lié à la force même des choses, il faut nous occuper maintenant des moyens de franchir cette distance. Il y a quelques années, l’administration se servait encore à cet effet du ministère des meneurs. Le voyage était long, pénible, insupportable. Ces hommes disposaient d’une étroite charrette où l’on entassait les nourrices avec leurs nourrissons ; l’incommodité qui résultait du mauvais air, des cris des enfans et des cahots de la voiture fit naître l’idée de changer un mode de transport si défectueux. Ajoutez à ces inconvéniens que la cherté des auberges forçait les meneurs de stationner en route dans de pauvres hôtelleries, les seules qui fussent toujours ouvertes et accessibles pour eux, mais où les nourrices étaient fort maltraitées. Le même voyage, qui durait autrefois douze et quatorze jours, n’en dure plus que trois ou quatre. L’administration a depuis quelque temps adopté un nouveau système de voitures à peu près semblables à nos omnibus, construites seulement avec plus de solidité, en vue des fatigues d’un service de diligences. Aujourd’hui les nourrices de l’hospice voyagent de toutes les manières ; quelques-unes ont continué de faire route à petites journées ; la plupart d’entre elles vont en poste ; enfin il y en a déjà qui circulent par les chemins de fer. Ce dernier moyen de transport serait sans comparaison le plus utile de tous pour abréger, pour supprimer même la distance ; il ne se trouve malheureusement pas très en rapport avec les faibles ressources dont l’établissement dispose. L’administration est en train, dans ce moment-ci, de traiter avec les directeurs des grandes lignes pour obtenir des conditions plus favorables. L’hospice ne pouvant se