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le titre offert de doyen protestant de la cathédrale et le fermage héréditaire des dîmes, ce qui assurait sa fortune. La mère d’Olivier Cromwell fut l’arrière-petite-fille de ce converti, Élisabeth Stewart, arrière-cousine de Charles Ier, roi d’Angleterre, et dont la dot consistait dans ces domaines et ces dîmes enlevés aux catholiques. La résistance catholique vient d’un Stuart ; la persécution protestante est exercée au XVIe siècle par deux Cromwell ; enfin la fortune qui découle de ces deux sources révolutionnaire et théologique se concentre sur le dictateur puritain Olivier Cromwell, symbole du protestantisme armé.

Cette fortune, honnête pour la province, trop peu considérable pour endormir l’ambition, équivalait à quelque trente mille livres de rente d’aujourd’hui. Olivier avait quatre ans, et Hinchinbrook n’était pas vendu, lorsqu’un bruit de chasse y annonça la venue de Jacques Ier, arrivant d’Écosse pour trôner en Angleterre, et qui rendait honneur à la parenté de mistriss Cromwell, une Stewart, comme nous l’avons dit, Le roi avait passé par Belvoir, le plus beau manoir féodal de l’Angleterre, et il était arrivé à Hinchinbrook, « toujours chassant, » dit la chronique. Le petit enfant Olivier, neveu du seigneur d’Hinchinbrook, put contempler la royauté dans sa pompe ; Jacques passa deux nuits chez les Cromwell-Stuart, ses alliés, fit des chevaliers dans la grande salle, et entre autres l’oncle paternel du protecteur, sans oublier son propre parent, Thomas Stuart ou Stewart d’Ely, oncle maternel de l’enfant. Puis il prit la route de Londres, laissant le revenu de sir Olivier entamé par les frais de la visite royale ; plusieurs années après, retournant en Écosse et renouvelant cet honneur coûteux, le monarque fut modestement hébergé par la bourse appauvrie du seigneur. Sir Olivier fut même forcé, en 1627, de céder son manoir pour la somme d’à peu près 75,000 francs d’aujourd’hui, que sir Sidney Montagu lui paya, et dont 32,500 devinrent la proie d’un seul créancier ; puis il alla cacher ses regrets, ses splendeurs éteintes et son royalisme invétéré dans les marais de Ramsey-Mere, où il avait une petite propriété ; son neveu, devenu chef puritain, revint l’y trouver plus tard, comme on le verra, avec une troupe de dévots à bandoulière de cuir.

Telle était la situation de la famille, où n’apparaît ni brasseur, ni boucher, et dont le second membre, père de Cromwell, enrichi par son mariage et résidant à Huntingdon, éclipsa bientôt le frère aîné, baronisé par le roi et enseveli dans ses marécages. A Huntingdon, de 1599 à 1620, pendant que l’Espagne et Rome s’armaient pour le catholicisme, que l’Écosse, l’Angleterre, la Saxe, la Scandinavie, se liguaient contre le Midi, pendant cette fermentation sourde et populaire